Trois militaires poursuivis pour avortement et viol: le tribunal ordonne une commission rogatoire

Kinshasa, 6 mai 2025 (ACP).- La commission rogatoire a été ordonnée, mardi, au procès des trois militaire de Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) accusés d’avortement criminel et viol devant le tribunal militaire de garnison de Kinshasa, lors d’une audience en flagrance au camp lieutenant-colonel Kokolo, à Kinshasa.

«Après avoir entendu les parties, le tribunal prend la requête en délibéré et se prononcera à une audience dont la date vous sera communiquée. En ce qui concerne notre position, nous avons décidé de procéder par commission rogatoire», a déclaré le président de la composition.

La commission rogatoire permettra au tribunal, selon le président de cette composition, d’accéder à la fiche médicale de la plaignante, de vérifier dans quel délai l’implant contraceptif allégué a été retiré, et de recueillir les déclarations du soldat de deuxième classe Holongo Véro.

«Le tribunal pourrait également convoquer le lieutenant Aimé Mahuwa, afin de disposer de tous ces éléments avant les conclusions des parties», a-t-il ajouté.

Le tribunal a également décidé de renvoyer la cause à une audience dans deux semaines.

«Nous devons aussi vérifier l’authenticité du rapport déposé par l’adjudant infirmier. L’instruction est suspendue et renvoyée à dans deux semaines», a encore relevé le président de la composition.

La défense conteste la qualité de victime de la plaignante

Avant cette décision, la défense a remis en question le statut de victime, de la prévenue Esther Nambola.

«Les prévenus sont poursuivis pour viol et avortement forcé, mais la plaignante nie tout en bloc. La déclaration contenue dans le procès-verbal a été établi à Kitona par un inspecteur non identifié, sans prestation de serment sur la sincérité de ses propos. Ce procès-verbal est donc nul et ne saurait faire foi en justice. (…) Le ministère public, qui a initié ces poursuites, semble aujourd’hui ne plus maîtriser ni assumer son accusation. Un doute persiste, car la prétendue victime nie les faits. Elle affirme même avoir été contrainte à faire de telles déclarations, sous la pression du général Ngoyi Égide, qui lui aurait remis 60.000 FC pour accuser faussement le capitaine Kamba, officier de renseignement», a soutenu Me Bondo, avocat du capitaine Kamba.

Demande de liberté provisoire

À la suite du renvoi, la défense a introduit une requête de mise en liberté provisoire en faveur de ses clients, soulignant qu’ils sont tous des parents ayant des adresses connues à Kinshasa, et que le risque de fuite est inexistant.

«Monsieur Kamba est un officier qui réside à Kinshasa. Il est malade. L’article 17, alinéa 1er de la Constitution dispose que la détention est l’exception, la liberté la règle. On ne juge pas sur la base d’impressions, mais en tenant compte de la dignité humaine, comme le prévoit l’article 18. C’est en vertu de cette disposition que la Cour constitutionnelle avait accordé une liberté conditionnelle à M. Matata pour ses soins à l’étranger, une jurisprudence jamais remise en cause. Nous sommes devant un tribunal de droit, dans un État civilisé, membre des Nations Unies, qui a ratifié les pactes relatifs aux droits civils et politiques, ainsi que la Convention contre la torture. Or, dans ce dossier, les déclarations de Mme la prévenue relèvent d’une torture morale qu’elle aurait subie», a plaidé Me Bondo.

Requête rejetée par le ministère public

Le ministère public s’est opposé à cette demande, exprimant des doutes quant à la véracité de la résidence déclarée.

«Monsieur le président, la défense a plaidé pour une liberté provisoire, mais lorsque nous consultons le dossier, le prévenu Kamba est déclaré résidant à Kitona-ville, quartier Calina, territoire de Muanda, dans la province du Kongo Central. C’est l’adresse indiquée lors de son identification. Or, Me Bondo vient d’affirmer qu’il réside à Kinshasa, sans autre précision. Il y a donc ici une double résidence. Devant cette contradiction, nous vous demandons de ne pas accéder à cette requête», a déclaré le procureur.

Le tribunal a conclu en demandant à la défense de patienter en attendant une décision sur cette requête.

Dans cette affaire, le parquet militaire poursuit les prévenus Laurent Kamba (capitaine), Jérémie Bidulu (adjudant infirmier) et Esther Nambola (soldat de 2e classe) pour avortement criminel et viol, selon l’extrait de rôle de la cause.

Les faits se sont produits au centre de formation militaire de Kitona, dans le Kongo Central. La soldate Esther Nambola venait de terminer sa formation et a été accusée par ses collègues d’entretenir une relation amoureuse avec son formateur, le capitaine Kamba, également mis en cause.

ACP/ODM

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