Trois questions à Maitre Henri Wembolua, Expert en Droits de l’homme

Kinshasa, 21 octobre 2024 (ACP).- Le procureur près  la Cour pénale internationale (CPI), Karim Khan avait annoncé lundi 14 octobre 2024 dans une correspondance adressée au gouvernement de la  République démocratique du Congo (RDC), la réactivation des enquêtes sur les crimes présumés relevant du Statut de Rome commis dans la province du Nord-Kivu, dans l’est du pays  depuis 2022.

Soucieux d’approfondir ce sujet de cette annonce, l’Agence congolaise de presse a posé lundi ces trois questions  à maitre Henri Wembolua, avocat et Expert en Droits de l’homme.  Il est également président de l’ONG «Alliance pour l’Universalité des Droits fondamentaux (AUDF) ». 

Question 1 : la CPI à travers son procureur général a annoncé dans un récent communiqué, la réactivation des enquêtes sur les différents crimes qui se commettent dans la partie Est de la RDC. Quel commentaire faites-vous à ce sujet en tant que homme de la loi?

Réponse : La RDC a adopté quatre lois de mise en œuvre du Statut de Rome du 31 décembre 2015 et  du 10 mars 2017, ce qui signifie qu’avec la domestication du Statut de Rome créant la Cour pénale internationale, le droit international s’internise et le droit interne s’internationalise.

La lutte contre les crimes graves présumés (crimes contre l’humanité, génocide, crimes de guerre et crime d’agression) de la compétence de la Cour pénale internationale doit contribuer à mettre fin à l’impunité, l’insécurité et les violations graves des droits de l’homme déplorés dans la partie est de la RDC et dans d’autres coin du pays.

Nous saluons et encourageons la décision du procureur de la CPI d’enquêter sur tous les cas de crimes présumés de la CPI sur toute l’étendue de la République et ce, sans distinction des groupes quelconque ce qui sous-entend tous les responsables des crimes graves (militaires, officiels, membres des Groupes armés…) de la RDC, du Rwanda, de l’Ouganda.

Question 2 : selon vous, qu’est ce qui a poussé la CPI à relancer ces enquêtes ?

La Coopération de la RDC et la CPI à travers le Mémorandum d’entente conclu en juin 2023 et la Table ronde tenue en novembre 2023 à Kinshasa avec les parties prenantes travaillant sur les cas prioritaires d’enquêtes et poursuites ainsi que le message du gouvernement de la RDC à la Cour pénale internationale à travers la délégation à la Haye au Pays Bas, le 9 octobre 2024, sont à la base de la décision de la CPI pour réactiver les enquêtes.

Sur terrain, la guerre du M23 soutenue par les Forces armées du Rwanda et les conséquences néfastes sur les populations sont un lourd fardeau et appellent des actions urgentes pour lutter contre l’impunité.

La volonté et l’engagement du Gouvernement sont de grande importance pour mener les enquêtes et engager des poursuites jusqu’à la condamnation des responsables de ces crimes notamment des meurtres, des bombardements des civils, des viols et d’autres violences sexuelles et détention arbitraire des personnes déplacées ainsi que destruction des biens.

Question 3 : quelle chance donnez-vous à l’aboutissement de ces enquêtes ?

A titre de rappel, la CPI a déjà condamné sur la situation de crimes graves en RDC messieurs Thomas Lubanga Dyilo, Germain Katanga et Bosco Taganda. Monsieur Ngundjolo a été  acquitté par cette Cour.

La justice pénale internationale est très rigoureuse d’où la nécessité d’un engagement conséquent pour la RDC. La CPI est complémentaire à la Justice nationale. Le lancement des enquêtes est déjà une dissuasion. Les présumés auteurs des crimes graves doivent cesser immédiatement leur barbarie et les atrocités commises sur les populations. Des cas emblématiques seront poursuivis par la CPI. Le Gouvernement avec ses partenaires mettront des moyens nécessaires pour juger d’autres personnes.

Des défis importants sont notamment l’appropriation des Lois de mise en œuvre du Statut de Rome par les magistrats civils, la collaboration entre les juridictions civiles et militaires, la protection des victimes et des témoins, la formation des spécialistes en médecine légale, la création d’une juridiction pénale spéciale pour la RDC et l’accélération du processus de la mise en œuvre des mécanismes holistiques de la justice transitionnelle en République Démocratique du Congo.

ACP/

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