Kinshasa, 6 mai 2025 (ACP).- Un appel à la revalorisation des coiffures traditionnelles congolaises a été lancé mardi par quelques coiffeuses et maquilleuses professionnelles de Kinshasa, en République démocratique du Congo, déplorant l’abandon croissant des styles capillaires africains au profit des modèles occidentaux, lors d’une ronde effectuée par l’ACP.
«Aujourd’hui, nos sœurs se précipitent vers les perruques brésiliennes, les lace wigs et les défrisages agressifs, oubliant que nos tresses, nos nattes, nos locks traditionnels sont aussi beaux qu’identitaires et nous pouvons bien les revaloriser », a plaidé Glodie Basikisa, coiffeuse et maquilleuse.
Selon elle, la coiffure a toujours été un puissant symbole culturel en Afrique.
«Autrefois, chaque coiffure racontait une histoire. Une femme luba, mangbetu ou mongo, n’avait pas besoin de parler pour qu’on devine son âge, son rang social ou son statut matrimonial», a-t-elle expliqué.
Glodie Basikisa s’est également indignée que cette richesse soit aujourd’hui diluée dans un mimétisme occidental assumé.
«Ce n’est pas mal d’innover, mais quand on efface totalement nos racines pour ressembler aux autres, on perd plus qu’un style et on perd notre âme», a-t-elle relevé.
Dans le même registre, Adel Mbuyi, une jeune entrepreneure capillaire, joint par l’ACP, a partagé son constat en ces termes: «nos coiffures traditionnelles ne sont pas des reliques du passé. Elles sont modernes, stylées, et elles méritent leur place dans les podiums et les rues de Kinshasa. Nous devons les imposer, pas les fuir».
Les femmes congolaises appelées à prendre conscience de leur patrimoine capillaire
Partant de cette analyse, Adel Mbuyi a appelé les Congolaises à prendre conscience de leur patrimoine capillaire et à en faire une force.
«Aujourd’hui, les afro-américaines nous copient avec fierté, pendant que nous, africaines, nous les imitons en rejetant ce que nous avons de plus précieux», a-t-elle évoqué.
Avec l’essor des réseaux sociaux, un nombre croissant de jeunes femmes renouent avec le naturel, les cheveux crépus et les coiffures afro. Toutefois, selon Florianne Manzambi, esthéticienne congolaise interrogée à ce sujet, ce mouvement demeure encore marginal dans la société.
«Le naturel revient, c’est vrai, mais trop timidement. Il faut que cela devienne une norme, pas une exception. Nous devons éduquer, sensibiliser, et surtout encourager nos filles à aimer leur texture, leur style, leur identité», a-t-elle préconisé.
Il sied de signaler que le débat sur les coiffures est plus qu’esthétique. Il touche à la question de l’estime de soi, de la décolonisation mentale et de la valorisation du patrimoine culturel congolais.
ACP/ODM