Nicolas Kasanda wa Mikalayi, 37 ans depuis qu’il a quitté la terre des hommes (Par Arthur Kayumba)

Kinshasa, 21 septembre 2022 (ACP).-  Trente-sept ans dans l’au-delà, malgré l’immense œuvre laissée à la postérité, Nicolas Kasanda wa Mikalayi, alias Dr Nico, virtuose guitariste de tout le temps par sa dimension artistique indéniable, ne reçoit pas les hommages dignes de son héritage musical, lequel  constitue un pan du patrimoine culturel congolais, laisse-t-on entendre dans les milieux de ses nombreux mélomanes vivant à Kinshasa, à Brazzaville et pourquoi pas dans certains pays ouest-africain.

Mieux vaut tard que jamais, affirme Herman Bangi Bayo, écrivain et opérateur culturel, dans ses propos souvent relayés dans les médias. Herman Bangi Bayo estime que,  37 ans durant, cette reconnaissance se fait toujours attendre, alors que la rumba congolaise dont il est parmi les artisans, est maintenant au patrimoine immatériel de l’humanité.

« Pourquoi pas créer un prix du concours à la guitare lui sera dédié ?  Ça ne sera que justice faite, et la nation manifestera sa reconnaissance à ce digne fils du pays qui a porté plus haut et très loin, le flambeau de notre musique », soutient cet opérateur culturel qui révèle, à l’occasion, que le cinéaste Balufu est en train de réaliser un film documentaire sur Dr Nico, avec le concours de sa fille Tity Kasanda.

Si la rumba congolaise est parvenue à  sceller ses lettres de noblesse  au patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO, c’est sans doute grâce aux multiples efforts menés  par les pionniers de la musique congolaise moderne qui s’étaient fixés des objectifs et qui ont posé les jalons qui devront continuer à exercer une influence sur l’identité nationale et sur la jeunesse montante.

Nicolas Kasanda wa Mikalayi, avec sa guitare, est demeuré égal à lui-même,  d’autant plus que beaucoup de ses mélomanes se souviennent de lui comme un instrumentiste qui jouait avec son cœur, dans cette course où il a eu une large partition qui a permis, dans cette ambiance, de contribuer à la  naissance du premier orchestre de scène, dénommé « African Jazz » et de la première école de la rumba congolaise, avant la deuxième dont il faut attribuer la création à François Luambo Makiadi, alias Franco, avec son style musical dit Odemba.

Selon Jean-Pierre Omanga Lokonga Onya et Marcello Willard Ngeleka Malangu Bukasa, également opérateurs culturels, Dr Nico Kasanda Wa Mikalayi, grâce à sa virtuosité, a réussi à introduire en 1964, la guitare hawaïenne dans la rumba congolaise jusqu’à l’imposer dans la culture.

Bref aperçu historique sur le virtuose guitariste

Né le 7 juillet 1939, guitariste, chanteur, auteur-compositeur, Nicolas Kasanda wa Mikalayi est issu d’une famille de guitaristes, à l’exemple de  son  frère ainé, Déchaud Charles Mwamba et ses deux cousins, Tino Baroza et Dicky Baroza.

Très précoce, Dr Nico débute sa carrière musicale sous les auspices de son frère ainé Déchaud Mwamba en 1951, alors qu’il n’est âgé que de 12 (douze) ans, aux éditions Opika en qualité de chanteur. Il participe au chant à l’enregistrement de chansons telles que : « Mwamba ya Mamo » et « Abeta mukaji mwimpe », du groupe Depe avec l’accompagnement de Dechaud Mwamba et Gobi Boyimbo à la guitare.

Il va ensuite enregistrer ses propres compositions, à l’exemple de « Elisa mukaji wa Mwamba » et  « Mwamba Charles ne Pierre bayi ku Kasaï ». Durant deux ans, le jeune Nico Kasanda apprend assidûment le maniement de la guitare. Sa doigté impressionne même ses aînés qui finissent par le présenter à Grand Kallé. Imitant le jeu de son cousin Tino Baroza, le jeune Nico finit par surclasser tous les autres guitaristes qu’il a trouvés aux éditions Opika, notamment son frère aîné Dechaud, Yamba Yamba, Gobi, Depe, etc.

Très jeune et ayant rapidement maîtrisé le maniement de la guitare, il est surnommé « Nico Mobali », c’est-à-dire, Nico un vrai homme, un costaud, un solide. Eblouissant dans ses interprétations, Nico est incorporé dans l’orchestre « African Jazz », que Grand Kalle vient de mettre en place en 1953, et là, Nico n’a que 14 (quatorze) ans. Il participe à l’exécution des chansons d’anthologie comme « Kalleato » ; « Parafifi » ; « Nzela mosika » ; « Bolingo lokola likey », etc.

En 1963, Dr Nico l’African Jazz avec Rochereau, Déchaud, Roger Izeidi pour aller créer l’African Fiesta et ils vont rester ensemble jusqu’en 1966, date de la partition de ce groupe en deux ailes African Fiesta Sukisa et National. Cette période est marquée par la fusion de talents de deux artistes d’exception, l’un, dieu de la guitare et l’autre, seigneur du chant.

L’étoile de Nico Kasanda commence à pâlir vers la fin de l’année 75 et  il connaitra une longue traversée du désert, reconnait Herman Bangi Bayo, qui affirme que malgré la main tendue de Rochereau en 1980 en l’intégrant dans l’Afrisa international, le Dr Nico rencontre la concurrence de deux autres solistes de talent, à savoir Damoiseau et Dino Vangu qui lui font ombrage. Il finit par quitter Rochereau. Miné par la maladie, il tire sa révérence le 22 septembre 1985. ACP/KHM/OB/MNI/HBB

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