Maroc –Kenya: un rééquilibrage sur les échanges commerciaux et la coopération bilatérale préconisés

Kinshasa, 27 mai 2025 (ACP/MAP).- Le chef de la diplomatie kényane, Musalia Mudavadi, a proposé mardi lors de sa visite officielle à Rabat, un rééquilibrage des échanges commerciaux et l’approfondissement de la coopération bilatérale dans les secteurs stratégiques,  allant de l’éducation à l’agriculture, en passant par la logistique et le transport aérien, a rapporté l’Agence marocaine de presse(MAP).

« Le Kenya veut rompre avec les déséquilibres d’un commerce à sens unique », a déclaré M. Mudavadi, chef de la diplomatie kényane. « Il y a urgence à corriger un déséquilibre manifeste, actuellement très favorable à nos partenaires d’Afrique du Nord », a-t- il ajouté, appelant à une réciprocité plus tangible. Face à un déséquilibre commercial jugé préoccupant,  les exportations marocaines vers le Kenya dépassent  930 millions de dirhams, contre à peine 39 millions pour les produits kényans. « Je lance l’appel Rabat à ouvrir davantage ses marchés au thé, au café et aux produits maraîchers d’Afrique de l’Est », s’est adressé le premier secrétaire du gouvernement et ministre kényan des affaires étrangères et de la diaspora à son homologue marocain Nasser Bourita.

Cette visite a été l’occasion de signer plusieurs protocoles d’accord dans des domaines jugés stratégiques : logement, commerce, jeunesse, formation diplomatique et coopération interinstitutionnelle. Autant de secteurs qui structurent la feuille de route proposée par Nairobi et accueillie favorablement par les autorités marocaines. L’un des accords les plus symboliques a été conclu entre l’École nationale supérieure de l’administration du Maroc (Ensam) et la Kenya School of Government.

Il marque une volonté claire de renforcer le dialogue institutionnel en matière de gouvernance publique et de formation des cadres supérieurs, deux enjeux majeurs pour des États en quête de performance administrative

Diplomatie de la connaissance et des mobilités

Sur le front éducatif, le Kenya souhaite amplifier la mobilité étudiante vers le Maroc. Aujourd’hui limité à une vingtaine de bourses universitaires, le contingent kényan pourrait croître dans les années à venir. Nairobi plaide aussi pour l’envoi d’enseignants kényans afin de répondre à la demande croissante en apprentissage de l’anglais dans le système éducatif marocain. Une manière de renforcer les synergies linguistiques dans un environnement francophone où l’anglais gagne progressivement en influence.

Ce volet éducatif n’est pas anecdotique : il illustre un renversement subtil de perspective où le Kenya, traditionnellement demandeur, propose aussi une expertise, notamment dans la diffusion de la langue anglaise en Afrique du Nord. Une vision de partenariat fondée sur la complémentarité plutôt que sur la simple assistance. Les discussions ont également porté sur les engrais, produit stratégique pour l’agriculture kényane et l’un des principaux postes d’importation depuis le Maroc. Nairobi sollicite désormais un traitement tarifaire préférentiel, afin d’alléger la facture des exploitants agricoles, dans un contexte marqué par une inflation persistante sur les intrants. Sur le plan logistique, la diplomatie kényane pousse pour la conclusion d’un accord de ciel ouvert. L’objectif : établir des vols directs entre Nairobi et les villes de Rabat, Casablanca ou Marrakech.

Cette ouverture des liaisons aériennes vise à fluidifier les échanges commerciaux et humains, mais aussi à dynamiser un tourisme encore largement sous-exploité entre les deux rives du continent.

Une convergence stratégique dans les enceintes multilatérales

Au-delà des dimensions bilatérales, la visite a permis aux deux ministres de réaffirmer leur volonté commune de renforcer la concertation politique dans les enceintes multilatérales. L’Union africaine (UA) et l’Organisation des Nations unies (ONU) sont identifiées comme des plateformes clées pour faire converger les positions de Rabat et Nairobi sur les grandes questions de paix, de sécurité et de développement sur le continent.

« Nous sommes convenus de maintenir nos échanges dans ces cadres afin de contribuer à la stabilité du continent et à la paix mondiale », a précisé M. Mudavadi, insistant sur la complémentarité des voix africaines face aux défis globaux. Le déplacement du chef de la diplomatie kényane s’inscrit dans une approche proactive de la politique étrangère du président William Ruto, qui mise sur une diversification des alliances et une intensification des partenariats sud-sud. Pour Nairobi, Rabat est un interlocuteur stratégique dans les domaines de la finance, de la logistique, de l’agriculture et de l’éducation.

Du côté marocain, ce rapprochement s’inscrit dans la stratégie africaine impulsée par le roi Mohammed VI depuis une décennie, marquée par le retour au sein de l’Union africaine et la multiplication des accords bilatéraux avec les pays subsahariens. Le Kenya, puissance économique et diplomatique d’Afrique de l’Est, offre au Maroc un ancrage précieux sur l’axe Nairobi-Dakar, complémentaire à son influence en Afrique de l’Ouest.

ACP/

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