Résolution 2773 : un tournant historique

Des signes qui ne trompent pas. Alors que le Conseil de sécurité des Nations-Unies s’apprêtait à voter la résolution 2773, le Secrétaire d’État britannique en charge des Affaires étrangères, du Commonwealth et du Développement, David Lammy, faisait son entrée vendredi dans le salon de Félix- Antoine Tshisekedi à la Cité de l’Union Africaine (UA). Le déplacement de ce ténor du gouvernement britannique, M. Lammy, marquait un tournant dans la position du Royaume Uni, jusque-là partenaire majeur du Rwanda, dans le traitement de la crise de l’est de la RDC, ainsi que l’engagement du gouvernement de Sa Majesté britannique à tourner la page de son partenariat avec Kigali désormais honni par l’ensemble de la communauté internationale.

Le même jour à New York, Londres confirmait ce revirement en votant la résolution 2773 du Conseil de sécurité et marquait sa détermination non seulement à user de tous les moyens pour la faire respecter, mais aussi et surtout à inscrire la RDC parmi ses partenaires majeurs sur la scène internationale.

Autre partenaire, autre signal tout aussi fort, le samedi 22 février 2025 dans la foulée du vote intervenu au Conseil de sécurité, le nouveau Secrétaire d’Etat américain, Marco Rubio, faisait clairement part au Président kenyan Williams Ruto, l’un des soutiens du président Paul Kagame sur la scène africaine et au sein de la Communauté économique est-africaine (EAC), de la volonté de Washington de tourner définitivement la page de la crise de l’est de la RDC, insistant sur la nécessité d’un cessez-le feu immédiat et condamnant les avancées du M23.

Le vent avait donc changé de direction là où certains analystes et observateurs n’avaient pas hésité à tourner en dérision l’option diplomatique mise en œuvre par le Président Tshisekedi. Deux ou trois semaines plus tôt, plusieurs déclarations au sein de la communauté internationale avaient dessiné le scénario de la descente aux enfers du régime de Kagame, en même temps que la RDC abattait sa carte maîtresse, aussi bien à Davos que lors du sommet sur la sécurité à Munich, en fait l’arme de destruction massive de la négociation sur les ressources minérales de la RDC avec les partenaires européens et américains.

Au jeu d’échecs, on ne fait qu’avec les pions dont on dispose. Le décor était du coup planté pour abattre les cartes les plus décisives, et le Rwanda ne pouvait que mordre la poussière lors du vote de la résolution 2773. Une résolution d’autant plus historique qu’elle vient mettre fin à plus de 30 ans de massacres, de pillages, de viols et de déplacements massifs des populations dans l’est de la RDC sous le silence complice sinon complaisant de la Communauté internationale. Cette résolution reprend pour l’essentiel les exigences contenues dans le plaidoyer plusieurs fois développé par la RDC dans différents forums internationaux : retrait immédiat du M23 et du Rwanda de toutes les positions occupées, notamment à Goma et Bukavu ; retrait total des troupes rwandaises de l’ensemble du territoire de la RDC ; cessez-le feu immédiat et arrêt de l’offensive. La résolution exige en outre le retour aux processus de Luanda et de Nairobi.

Au total, il ressort de cette résolution que le Rwanda est bel et bien l’agresseur ayant en plus envahi le territoire de la RDC en violation du droit international et de la charte de l’ONU, soutenant le M23 ainsi que son entreprise de pillage des minerais de la RDC. Cette résolution cloue au pilori l’ancien président de la Céni Corneille Nangaa et son aventure de l’AFC/M23, de même qu’elle dégonfle la démarche des églises catholique et protestante qui avaient misé sur leur prétendu dialogue comme condition du retrait des troupes rwandaises et celles du M23. Il en est de même des caciques du FCC-PPRD (la famille politique de l’ancien président Joseph Kabila), dont la prière constante était l’effondrement de la RDC sous les coups de boutoir du binôme RDF-M23 afin de faciliter leur retour au pouvoir par des voies non démocratiques et la réinstallation du régime des privilèges.

Par contre, la résolution exige bel et bien un retrait immédiat et sans condition, le retour aux processus de Luanda et Nairobi, en même temps qu’elle brandit la menace de l’usage de la force si le Rwanda et le M23 ne s’exécutent pas.

Abandonné par les Etats-Unis, l’Union Européenne, le Canada, le Royaume Uni, la Chine, la Russie…le Rwanda a en outre vu s’effondrer sa rhétorique passe-partout sur le génocide des Tutsi en RDC et la menace des FDLR (rebelles hutu rwandais) qui lui servaient de prétexte à sa croisade sanglante dans l’Est congolais.

La résolution 2773 marque donc un tournant historique mais surtout la fin de l’arrogance du régime de Kigali. Il reste, évidemment, à la RDC d’en prendre acte et de se comporter en conséquence.

Cela passe par la réorganisation de l’armée moyennant le recrutement des Congolais patriotes. Ce qui permettra d’exclure tous les éléments infiltrés, traitres et déloyaux.

Mais aussi la signature d’alliances puissantes et crédibles dans le domaine militaire et de la sécurité. Il va falloir remettre au goût du jour la construction du mur frontière avec le Rwanda et l’Ouganda et corriger les déséquilibres démographiques nés de la crise en repeuplant l’est du pays avec des Congolais de provenant de toutes provinces du pays, comme à l’époque du président Mobutu Sese Seko.

Il va falloir créer un pacte social plus protecteur de la Nation, fondé sur une Constitution patriotique, contre les velléités expansionnistes des voisins.

Bienvenu-Marie Bakumanya

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