La crise humanitaire en RDC, l’une des plus négligées et tolérées au monde (coordonnateur humanitaire en RDC)

Kinshasa, 19 août 2024 (ACP).- La crise humanitaire en République démocratique du Congo a été qualifiée comme l’une des plus négligées et tolérées au monde, dans un message du coordonnateur des affaires humanitaires en RDC, consulté lundi par l’ACP, à l’occasion de la journée mondiale de l’aide humanitaire,

« Au cours des dernières semaines, nous avons également été témoin d’une flambée inquiétante d’attaques de groupes armés contre les populations civiles dans les provinces de l’Ituri et du Nord-Kivu. Malgré la gravité de ces tueries et de ces souffrances, le monde ne s’est suffisamment pas indigné face à cette situation catastrophique. Cette absence d’indignation collective, cette tolérance, questionne profondément notre humanité et notre capacité à prévenir et à agir contre la violence systématique qui décime des vies innocentes. C’est pour cela que j’appelle cette crise non seulement l’une des plus négligées au monde, mais également l’une des plus tolérées« , a déclaré Bruno Lemarquis, coordonnateur de l’aide humanitaire en RDC.

 « Entre janvier et juillet, plus de 630 civils ont été tragiquement tués dans les territoires de Mambasa et d’Irumu, en Ituri et dans les territoires de Béni et Lubero au Nord-Kivu.

Ces attaques ont occasionné des dizaines de milliers de nouveaux déplacés et la suspension temporaire de l’assistance humanitaire dans certaines zones« , a-t-il ajouté, avant de souligner qu’il est impératif que les voix de ceux qui souffrent soient écoutées et entendues et que des mesures concrètes soient prises pour mettre fin à ce cycle de violence insupportable qui dure depuis des décennies en vue de protéger les plus vulnérables.

« Nous ne devons pas nous habituer à la violence. Elle est simplement inacceptable.

Cette année, le thème choisi pour la commémoration de la journée mondiale de l’aide humanitaire, ‘’Agir pour l’humanité’’, est un appel à l’action », a-t-il enchéri.

En aucune circonstance les humanitaires ne doivent être pris pour des cibles

Parlant de six travailleurs humanitaires qui ont été tués et 11 autres enlevés entre janvier et juin de cette année, avec plus de 200 incidents ayant directement ciblé les humanitaires sur le terrain, M. Lemarquis a, insisté sur le fait qu’en aucune circonstance, les humanitaires ne doivent être pris pour des cibles. 

« Le souvenir de nos deux collègues tués le 30 juin dernier lors de l’incendie d’un convoi humanitaire par des groupes de jeunes armés à Butembo est encore vif dans nos esprits. Nous devons agir pour protéger les populations civiles et les humanitaires contre la violence, agir contre l’impunité des auteurs d’attaques contre les humanitaires et les civils. Nous devons agir pour la paix« , a-t-il souligné. 

« Lorsque nous échouons à protéger les civils et les humanitaires, nous mettons en péril les fondamentaux des droits humains, notamment l’accès à l’aide humanitaire aux personnes en situation de détresse. Cette spirale de violence et de souffrance détruit les fondements de la cohésion sociale et de la paix. Elle détruit également les écoles et les centres de santé. Elle prive des milliers d’enfants du droit à l’éducation et des communautés entières de l’accès aux soins de santé« , a-t-il ajouté.

Plus de 400 000 nouvelles personnes déplacées depuis décembre 2023

M. Lemarquis a fait savoir qu’au premier semestre 2024, environ 7,3 millions de personnes étaient déplacées en RDC. Ce qui correspond à plus de 400 000 nouvelles personnes déplacées depuis décembre 2023.

« Ces déplacements massifs de populations, générés par les conflits armés, couplés aux conditions de vie précaires qui en résultent, créent un terreau fertile à la violence sexuelle contre les femmes et les filles et à la prostitution comme moyen de survie, mais aussi à la propagation rapide d’épidémies telles que le choléra, la rougeole et la variole simienne dans les zones affectées par ces violences« , a-t-il déclaré.

« Malgré ces défis, les Nations Unies et les ONG locales et internationales restent plus que jamais engagées à apporter l’aide nécessaire aux populations affectées par les crises, en étroite coordination avec les autorités nationales. Cependant, le plan de réponse humanitaire pour 2024 est financé à seulement 35%, ce qui signifie que des centaines de milliers de personnes vulnérables sont laissés pour compte« , a-t-il précisé, tout en témoignant sa reconnaissance aux partenaires et bailleurs de fonds pour tout leur appui.

« Etant bien conscient des multiples priorités au niveau global, nous vous incitons, chers partenaires et bailleurs de fonds, à toujours faire plus« , a-t-il ajouté.

Les populations congolaises veulent la paix

M. Lemarquis a, en outre, indiqué que : «  lors de mes récentes visites sur le terrain à Bunia, à Djugu, à Goma, à Beni, à Oicha, des centaines de congolais et congolaises que j’ai rencontrés ne demandaient qu’une seule chose : « Amani » ( la paix). Les populations congolaises sont fatiguées de la guerre. Elles veulent la paix. Les déplacées veulent rentrer et retrouver une vie normale, cultiver leurs terres. Les enfants veulent aller à l’école ».

« Ceci étant, si l’assistance humanitaire est indispensable pour apporter de l’aide aux personnes les plus dans le besoin, il reste qu’elle n’est pas la solution aux problèmes humanitaires. Pour sortir de cette spirale de conflits, de violence et de vies brisées et permettre à la RDC de s’engager pleinement vers sa trajectoire de développement, il est impératif que toutes les parties prenantes s’engagent pleinement dans la recherche de solutions politiques« , a-t-il martelé.

« Il faut aussi  que tous les efforts soient faits pour s’attaquer aux causes sous-jacentes des conflits, notamment les questions foncières, la question de l’exploitation illicite des ressources naturelles et la question des flux financiers illicites (…) pour appuyer la mise en œuvre de solutions durables pour les personnes déplacées lorsque les conditions le permettent et pour opérationnaliser le Nexus humanitaire-développement-paix pour réduire les besoins humanitaires« , a-t-il insisté.

M. Bruno Lemarquis est, non seulement Coordonnateur des affaires humanitaires en RDC, il est également Représentant spécial adjoint du secrétaire général des Nations Unies en RDC et Coordonnateur du développement.

Chaque année, l’ONU célèbre la Journée mondiale de l’aide humanitaire le 19 août, date anniversaire de l’attentat contre son quartier général à Bagdad en 2003.

ACP/C.L

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