Afrique du Sud : Jacob Zuma exclu des élections générales

Kinshasa, 20 mai 2024 (ACP).- La Cour constitutionnelle, la plus haute juridiction sud-africaine, a déclaré, lundi, l’ex-président Jacob Zuma  inéligible en raison d’une condamnation à la prison en 2021 et a prononcé son exclusion des élections générales prévues le 29 mai, a appris l’ACP de source officielle sud-africaine.

«Jacob Zuma a été reconnu coupable d’une infraction et condamné à une peine d’emprisonnement de plus de 12 mois. Par conséquent, il ne peut être membre de l’Assemblée nationale et ne peut se présenter aux élections », a déclaré Leona Theron, juge.

«Cette décision de la Cour annule la victoire en appel de Zuma auprès de la Cour électorale, qui l’avait initialement autorisé à se présenter. La Cour constitutionnelle s’est basée sur une section de la constitution qui disqualifie les candidats condamnés à plus de 12 mois de prison », a-t-elle ajouté.

Selon elle, l’ancien président comptait se présenter, lors du scrutin prévu le 29 mai 2024, afin de tenter de remporter un siège de parlementaire, à la tête du parti récemment créé, le uMkhonto we Sizwe (MK).

Une décision annoncée en l’absence de Jacob Zuma

La Cour considère que sa condamnation à 15 mois de prison, reçue pour outrage à la justice il y a trois ans, l’empêche, selon la Constitution, d’être candidat pour un poste de parlementaire jusqu’en 2026. Et ce, même s’il n’en a effectué qu’une petite partie, pour raison médicale, et qu’il a ensuite obtenu une remise de peine.

Sur les bancs de la Cour, pas de trace de l’homme de 82 ans, c’est le Secrétaire général du MK qui s’est exprimé à la sortie, regrettant cette décision, mais précisant que Jacob Zuma restait bien le chef du parti. Et d’ailleurs, à ce titre, son visage devrait toujours apparaitre sur les bulletins de vote, lors des élections générales.

Cette décision vient mettre fin à une série de retournements judiciaires, puisque la cour électorale avait tranché en faveur de l’ancien président, alors que la commission électorale avait, dans un premier temps, exclu sa candidature. Et comme la Cour constitutionnelle est la plus haute cour du pays, cette décision est finale et l’ancien président ne pourra pas faire appel.

Le MK continue néanmoins de représenter une menace pour l’ANC au pouvoir, qui craint de perdre, pour la première fois en 30 ans, sa majorité à l’Assemblée Nationale.

Et les autorités sont aussi dans l’incertitude quant aux conséquences de cette disqualification,  les forces de l’ordre ont précisé ce week-end être sur le qui-vive, en cas d’émergence de violences dans le pays.

L’ANC risque de perdre sa majorité absolue

La saga judiciaire autour de la participation ou non de Jacob Zuma au scrutin a monopolisé les débats en amont des élections qui s’annoncent comme les plus indécises de ces trente dernières années.  

Fin mars, la commission électorale (IEC) avait exclu Jacob Zuma du scrutin. Mais cette décision avait été renversée en avril par un tribunal électoral. L’IEC a finalement saisi la Cour constitutionnelle le mois dernier pour qu’elle tranche sur l’éligibilité contestée de celui qui a maintes fois clamé « ne pas avoir peur de la justice ».

Plus de 27,5 millions de Sud-Africains sont appelés le 29 mai à élire leurs députés, qui désigneront ensuite le prochain président. Le Congrès national africain (ANC), au pouvoir depuis la fin de l’apartheid, risque pour la première fois de perdre sa majorité absolue au Parlement et d’être contraint à former un gouvernement de coalition.

Zuma jouit d’un fervent soutien populaire

Jacob Zuma était candidat à un siège de député et inscrit sur les bulletins de vote déjà imprimés comme tête de liste d’un nouveau parti d’opposition baptisé Umkhonto We Sizwe (MK, « Lance de la nation » en zoulou).

L’ex-pilier de l’ANC avait créé la surprise en annonçant en décembre soutenir le MK qui, selon les spécialistes, séduit des partisans du parti historique déçus par un chômage endémique, une croissance économique lente, une criminalité record et la multiplication des scandales de corruption impliquant des hauts dirigeants.

L’ANC a suspendu Jacob Zuma en janvier. Mais malgré son changement de bord, l’habile et charismatique politicien qui a toujours bénéficié d’un fervent soutien populaire et conservé une influence a réussi ces dernières semaines à rassembler des foules.

Des menaces de troubles lors du scrutin

Quelque 30 000 partisans sont venus samedi danser et chanter dans un stade de Soweto avec l’ancien chef d’État poussé à la démission en 2018 après une série de scandales et encore jugé pour corruption.

Son incarcération en 2021 avait été suivie, dans un climat socio-économique morose, d’une vague de violences sans précédent dans le pays depuis la fin de l’apartheid, faisant plus de 350 morts.

Des membres du MK ont promis « l’anarchie » si les tribunaux tourmentaient leur formation avant les élections, suscitant l’inquiétude des autorités. Les forces de sécurité sud-africaines ont déclaré dimanche que « des menaces » ont été identifiées mais qu’une « tolérance zéro » sera appliquée contre toute tentative de troubles. L’armée sera déployée « si nécessaire », ont-elles ajouté.

Les sondages attribuent plus de 8 % des intentions de vote au MK, l’ANC tombant aux alentours des 40 % et le premier parti d’opposition (Alliance démocratique, DA) dépassant les 20 %.

Cette exclusion marque une fin de saga judiciaire décevante pour Zuma, qui était revenu sur la scène politique l’année dernière en créant le parti MK. Malgré cette exclusion, la popularité de Zuma pourrait permettre à son parti d’éroder une partie des voix de l’ANC, au pouvoir depuis 30 ans en Afrique du Sud. ACP/ODM

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