Kinshasa, 17 mars 2024 (ACP).- La junte militaire au pouvoir au Niger a mis fin à la coopération militaire avec des membres du personnel militaire et civil du département américain de la Défense sur son territoire, a appris dimanche l’ACP de source officielle nigérienne.
« La junte met fin à la coopération militaire avec les Etats-Unis. Le gouvernement nigérien prend en compte les aspirations et les intérêts de son peuple, et décide en toute responsabilité de dénoncer avec effet immédiat l’accord relatif au statut du personnel militaire des États-Unis et des employés civils du département américain de la Défense sur le territoire du Niger », a indiqué le colonel Amadou Abdramane, porte-parole du régime.
« La présence américaine sur le territoire de la République du Niger est illégale, et le régime dénonce, avec effet immédiat l’accord de coopération militaire passé avec les États-Unis en 2012, et affirme que la présence américaine viole toutes les règles constitutionnelles et démocratiques », a précisé le colonel Amadou Abdramane.
Après son arrivée au pouvoir lors d’un coup d’État le 26 juillet 2023, le régime de Niamey avait dénoncé des accords de coopération militaire avec la France et les derniers soldats français ont quitté le Niger fin décembre.
Après le coup d’État qui a renversé le président élu Mohamed Bazoum, Washington a suspendu sa coopération avec le Niger.
Mais les États-Unis comptent quelque 1.100 soldats engagés dans la lutte antijihadiste dans le pays et disposent d’une importante base de drones à Agadez (nord).
En décembre ils s’étaient dit prêts à reprendre cette coopération, sous conditions.
Selon la junte militaire au pouvoir, cet accord injuste été imposé unilatéralement par les États-Unis, via une simple note verbale, le 6 juillet 2012.
L’arrivée de la délégation américaine n’a pas respecté les usages diplomatiques
Cette décision survient après une visite de trois jours d’une délégation américaine menée par la secrétaire d’État adjointe aux Affaires africaines, Molly Phee.
« L’arrivée de la délégation américaine n’a pas respecté les usages diplomatiques. Le gouvernement américain avait informé Niamey de façon unilatérale de sa date d’arrivée et de la composition de sa délégation», a expliqué Amadou Abdramane.
Au cours de cette visite de trois jours, Molly Phee n’a pas pu rencontrer le chef du régime militaire Abdourahamane Tiani, selon une source gouvernementale nigérienne.
Il a également dénoncé l’attitude condescendante de Molly Phee, une attitude de nature à saper la nature des relations entre les deux pays, selon lui.
Elle a cependant pu rencontrer deux fois le Premier ministre nommé par la junte, Ali Mahaman Lamine Zeine.
« Washington avait pris connaissance du communiqué du régime de Niamey et qu’il faisait suite à des « discussions franches sur nos préoccupations concernant la trajectoire de la junte », a fait savoir Matthew Miller, porte-parole du département d’État américain.
« Les États-Unis sont toujours en contact avec la junte et fourniront de nouvelles informations si nécessaire », a-t-il ajouté.
IT/Le Niger dénonce les menaces de la part de la délégation américaine vis-à-vis du gouvernement nigérien
Le gouvernement du Niger dénonce-t-il avec force l’attitude condescendante assortie de la menace de représailles de la part de la délégation américaine vis-à-vis du gouvernement nigérien. « Cette attitude est de nature à saper la qualité de nos relations séculaires et miner la confiance entre nos deux gouvernements, déjà entamé par les événements du 19 octobre dernier », a-t-il annoncé.
Selon le porte-parole du CNSP, sur le choix des partenaires diplomatiques, stratégiques et militaires, le gouvernement du Niger regrette la volonté de la délégation américaine de dénier au peuple nigérien souverain, le droit de choisir ses partenaires et les types de partenariat à même de l’aider à lutter véritablement contre le terrorisme, alors même que les Etats-Unis ont décidé unilatéralement de suspendre toute coopération entre les deux pays.
Le colonel Abdramane a également évoqué le retour à l’ordre constitutionnel dans ce pays qui s’est rapproché de ses voisins le Burkina et le Mali, eux aussi gouvernés par des militaires, mais aussi de pays comme l’Iran ou la Russie.
Le Niger n’a jamais signé d’accord secret avec la Russie et l’Iran
S’agissant des cas précis de la Fédération de Russie et de la République Islamique d’Iran, deux pays avec lesquels le Niger entretient des relations diplomatiques depuis plusieurs décennies, M. Amadou a indiqué que « le gouvernement tient à porter à la connaissance du peuple nigérien et de tous les peuples de la communauté internationale, qu’il n’a jamais signé d’accord secret avec ses pays partenaires ».
Quant à la Fédération de Russie, le porte-parole du CNSP a déclaré qu’il s’agit « d’un partenaire avec lequel le Niger traite d’Etat à Etat, conformément aux accords de coopération militaire signés avec les gouvernements antérieurs pour acquérir le matériel militaire nécessaire à sa lutte contre le terrorisme qui a fait des milliers d’innocentes victimes nigériennes, sous l’œil indifférent d’une bonne partie de la communauté internationale ».
Par ailleurs, depuis quelques semaines, le gouvernement nigérien a constaté des activités illégales de survols de son territoire par des aéronefs américains, qui amènent à s’interroger sur la sincérité de leur partenariat et la pertinence du maintien de l’accord de coopération imposé par une note verbale.
Il a ajouté qu’une correspondance diplomatique serait adressée à la partie américaine à cet effet.
Il faut rappeler que cette dénonciation des accords de coopération militaire avec les Etats-Unis intervient après celle de ceux avec la France, dans plusieurs domaines de sécurité et de défense, suite au coup d’Etat du 26 juillet dernier
« Le gouvernement du Niger a réaffirmé sa ferme volonté d’organiser dans les meilleurs délais le retour à une vie constitutionnelle normale », a-t-il déclaré, assurant qu’il s’agissait d’un « engagement solennel » du président de la transition, « tel qu’exprimé dans son adresse à la Nation du 19 août ».
Depuis le coup d’État, le Niger a notamment comme le Burkina et le Mali, quitté la Communauté économique des États d’Afrique de l’ouest (Cédéao) qui l’avait lourdement sanctionné.
Le Niger, le Burkina et le Mali ont annoncé la création d’une force conjointe pour lutter contre les jihadistes qui frappent régulièrement leurs trois pays. ACP/ KHM/CL