Addis-Abeba : « Nous sommes ici parce que le Rwanda a violé la charte de l’ONU » (Première ministre de la RDC)

Kinshasa 15 février 2024 (ACP).- La violation de la charte des Nations Unies par le Rwanda, pays agresseur de la République démocratique du Congo, a été dénoncée vendredi par la Première ministre de la RDC, lors de la réunion du Conseil paix et sécurité de l’Union africaine à Addis-Abeba (Éthiopie), a-t-on appris samedi de la Primature.

« L’heure est grave. Ce Conseil ne se réunit pas pour un simple différend diplomatique. Nous sommes ici parce qu’un État membre de notre Union, le Rwanda, a violé les principes fondamentaux de la charte des Nations Unies et de l’Acte constitutif de l’Union Africaine », a déclaré Judith Suminwa, Première ministre.

« L’occupation illégale des territoires congolais par les troupes rwandaises, sous couvert du groupe terroriste M23, constitue un acte de guerre et une menace pour la stabilité de toute la région », a-t-elle ajouté.

La cheffe du gouvernement congolaise a, en outre, souligné que le M23 a été désigné par l’UA elle-même. « Ce n’est pas une simple accusation ; le M23 a été désigné comme un groupe terroriste par l’Union africaine elle-même. Pourtant, ce groupe continue d’opérer avec le soutien d’un État membre, en toute impunité. Pire encore, le Rwanda ne se contente plus de soutenir des groupes terroristes, il a désormais engendré une rébellion, l’Alliance du fleuve Congo (AFC), dont l’objectif déclaré est de renverser, par la force et dans le sang, un gouvernement légitime et reconnu par cette Union », a-t-elle renchéri.

Judith Suminwa a également rappelé l’action du Conseil Paix et Sécurité, qui a déjà condamné, par le passé, l’agression d’un État membre contre un autre.

« En 2008, lors du conflit entre l’Érythrée et Djibouti, ce Conseil a su exercer son mandat avec courage et fermeté. Réuni à Sharm El-Sheikh en Égypte, comme aujourd’hui, le Conseil de paix et sécurité avait pris une décision historique qui fait jurisprudence et qui doit nous servir de boussole aujourd’hui. Je cite : +Condamne fermement l’action militaire conduite par l’Érythrée contre Djibouti à Ras Doumeira et dans l’île de Doumeira, et exige de l’Érythrée qu’elle se retire immédiatement et inconditionnellement des territoires djiboutiens qu’elle occupe », a rappelé Mme Suminwa.

Cependant, a-t-elle encore indiqué, plusieurs instances régionales et internationales ont dénoncé sans ambiguïté cette agression. A titre d’exemple, la Communauté économique des États de l’Afrique Centrale (CEEAC), dont la RDC et le Rwanda sont membres a, dans sa déclaration du 7 février 2025, condamné fermement le groupe armé M23 soutenu par le Rwanda, et a appelé ces derniers à quitter les territoires occupés illégalement et de respecter les couloirs humanitaires.

La Première ministre congolaise a de même rafraîchi la mémoire des membres du Conseil Paix et Sécurité, en évoquant la condamnation par cette instance de l’UA, en date du 28 janvier 2025, d’énormes massacres et de déplacements massifs des populations civiles.

« Il convient de signaler que pendant que nous siégeons, en violation de toutes ces obligations de cessez-le feu et autres injonctions, le Rwanda et ses supplétifs du M23 poursuivent leur folie guerrière dans le Sud-Kivu, précisément à Kalehe et Kavumu, en direction de la grande agglomération de Bukavu. Par ses actions d’invasion, le Rwanda viole systématiquement les obligations qui découlent pour tout Etat membre au titre de l’Acte constitutif de notre Organisation continentale », a déploré la Première ministre de la RDC.

Le Conseil paix et sécurité de l’UA appelé à réaffirmer le respect de l’intégrité territoriale

Dans le souci de faire taire les armes, Judith Suminwa a, par ailleurs, appelé le Conseil paix et sécurité de l’UA à réaffirmer l’impératif du respect de l’intégrité territoriale des nations afin de contribuer pleinement au respect de celle de la RDC.

« Si vous voulez réellement contribuer à faire taire les armes, voici les mesures essentielles : réaffirmer l’impératif du respect de l’intégrité territoriale, de la souveraineté et de l’unité de la RDC, réitérer le principe d’intangibilité des frontières africaines telles qu’héritées de la colonisation, condamner sans réserve l’invasion militaire rwandaise et exiger le retrait immédiat de ses troupes et supplétifs du M23 », a-t-elle recommandé.

À celles-ci s’ajoutent :« envisager l’exclusion du Rwanda des contributions aux missions de maintien de la paix, exiger la cessation immédiate de toute tentative d’administration illégale dans les zones occupées par l’alliance criminelle AFC/M23/RDF, condamner l’exploitation illégale des ressources congolaises par le Rwanda et réaffirmer que le processus de Luanda, sous la médiation du Président Lourenço, demeure le cadre privilégié pour la résolution du conflit, et que le Processus de Nairobi est l’unique canal légitime pour le dialogue avec les groupes armés, y compris le M23 », a-t-elle conclu.

Signalons qu’il y a deux jours, le Parlement européen a voté une résolution appelant à la suspension immédiate du mémorandum d’entente conclu entre l’Union européenne et le Rwanda sur les chaînes de valeur des matières premières durables signé le 19 février 2024.

Selon un communiqué du Parlement européen, cette résolution a été adoptée avec 443 voix pour, 4 contre et 48 abstentions. ACP/UKB

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