Kisangani, 02 août 2024 (ACP).- Des victimes de « la guerre de 6 jours » ayant opposé du 5 au 19 juin 2000 à Kisangani, sur le sol de la République démocratique du Congo, les armées rwandaise et ougandaise, ont fait le témoignage, vendredi, de la souffrance endurée devant Judith Suminwa, Première ministre, lors de la cérémonie commémorative du Génocide congolais (Genocost).
« Je n’avais que 9 ans, élève en 3ème année primaire à l’époque, lorsque les armées ougandaise et rwandaise se sont affrontées à Kisangani et c’est le tout premier jour que la bombe avait saccagé notre maison et j’avais perdu mes deux jambes. Qu’est-ce que j’ai fait pour mériter ça? Merci au Président de la République pour cette réparation », a déclaré Théthé Soli, une femme rescapée de la « guerre de 6 jours ». « Je souffre à cause des inconnus », a-t-elle regretté.
« Je réponds au nom de Léon Kalume.
Chers frères et sœurs, si vous me voyez en ce lieu présentement, c’est par la grâce de Dieu. J’étais un jour à Mihambwe, les militaires rwandais ont surgi chez nous dans notre ville. Je n’ai pas la force, que l’État nous aide. Aidez-moi, car je suis complètement amorti », a déclaré la seconde victime avant de fondre en larmes.
Pour sa part, à partir de Kinshasa, Jean Pierre Lihau, vice-Premier ministre de la Fonction publique, a insisté : « Aujourd’hui, est un jour bien particulier, un jour sombre, un jour qui nous rappelle l’étendue de souffrances qu’a endurée la RDC en tant que Nation (…) Aujourd’hui est un jour triste où la Nation s’arrête pour se souvenir des millions et millions de ses filles et ses fils massacrés ».
La journée nationale du Génocide congolais pour des gains économiques (Genocost), célébrée sur toute l’étendue de la République, a été placée sous le thème « Hommage à nos millions de morts ».
Un monument a été érigé à Kisangani à cette fin.
« La quête de justice et de réparation », ainsi que l’appel ardent à ne plus jamais revivre la barbarie et les actes génocidaires des pays agresseurs, dont le Rwanda, ont constitué, en général, le contenu des témoignages émouvants des victimes qui ont défilé devant la Première ministre Judith Suminwa, représentante du chef de l’État à la mairie de Kisangani, chef-lieu de la province de la Tshopo.
Genocost : des scientifiques Témoignent
« Il faut que les Congolais puissent vaincre la peur de parler d’eux-mêmes, pour se faire entendre par les autres et espérer à un changement. Souvent nous sommes distraits devant des évènements dramatiques qui se passent aux côtés de nous, pour ne parler que des choses périphériques, qui ne permettent pas de faire une avancée dans le bien-être des populations », ont mentionné le professeur Norbert Ngoy Mwepu et M. Dieudonné Ngoie Mpanya, respectivement directeur adjoint du centre des recherches interdisciplinaires de l’éducation (CRIDE) et directeur de patrimoine à l’université de Kisangani.
« En juin 2000, nous avions assisté à une guerre insolite où deux pays étrangers se sont battus à Kisangani, et cela nous a révolté en tant que citoyen congolais. Nous avions vu mourir des enfants et femmes, et cela a interpellé notre responsabilité d’en parler. Rédigé en 2003, notre ouvrage a été publié en 2020 aux éditions L’Harmattan, soit dix (10) ans après la guerre de six jours, suite à la peur que nous faisaient certaines personnes, de citer nommément les Tutsi et les Rwandais comme présumés auteurs de cette guerre », ont-ils rappelé dans un ouvrage collectif.
Le professeur Norbert Ngoy et M. Dieudonné Ngoie ont tous deux fait savoir que l’ouvrage sur la protection de l’enfant en temps des guerres en RDC n’aborde pas seulement l’aspect de la guerre de six jours à Kisangani. En le lisant, l’on peut également comprendre comment la guerre de l’est de la RDC, s’est glissée progressivement jusqu’à Kisangani.
« Nous avions évoqué le contexte de la guerre de six jours dans cet ouvrage, après avoir abordé ce qui se passe à l’est du pays depuis plusieurs décennies. Nous avons montré comment cette guerre s’est glissée progressivement vers Kisangani, à travers les militaires étrangers qui accompagnaient Laurent Désiré Kabila en 1997. Ces militaires ont perpétrés la pire crime contre l’humanité à Kisangani le 02 août de l’année 2000, pour manifester leur refus de regagner leurs propres pays », ont indiqué les deux chercheurs de l’université de Kisangani.
Ils ont de ce fait, appelé les chercheurs congolais à ne pas rester indifférents face aux faits sociaux.
Notons que le gouvernement congolais a décrété la date du 02 août de chaque année « journée du Genocost », pour rendre hommage à toutes les victimes des guerres en République démocratique du Congo. En 2024, cette journée a été commémorée à Kisangani, dans le Nord-est est du pays, au regard des atrocités dont a subies cette ville.
ACP/C.L.