Kinshasa, 06 juin 2021 (ACP).- Plusieurs plaintes déposées par des ONG anti-corruption française et libanaise ont conduit la justice française à lancer une enquête pour « association de malfaiteurs » et « blanchiment en bande organisée » contre Riad Salamé, le très contesté gouverneur de la banque centrale du Liban, a-t-on appris dimanche des médias internationaux.
Selon ces sources, les investigations devraient notamment permettre d’éclaircir la provenance du riche patrimoine du gouverneur de la banque centrale du Liban, aujourd’hui âgé de 70 ans. Alors qu’il était déjà visé depuis plusieurs mois par une enquête en Suisse pour blanchiment d’argent aggravé en lien avec un éventuel détournement de fonds au détriment de la Banque du Liban, deux plaintes ont été déposées en avril en France, où Riad Salamé possède plusieurs biens immobiliers et où des flux financiers suspects ont pu transiter.
La première a été déposée par la fondation suisse Accountability Now, ces mêmes sources. La seconde émane de l’ONG Sherpa, qui lutte contre la grande délinquance financière, et du Collectif des victimes des pratiques frauduleuses et criminelles au Liban, constitué par des épargnants spoliés lors de la crise qui frappe le pays depuis 2019.
« Une méga-enquête s’ouvre, œcuménique, à dimension européenne », se sont félicité les avocats de Sherpa et du collectif, Me William Bourdon et Amélie Lefebvre, à l’annonce de cette enquête française. « De vastes opérations de blanchiment seront auscultées qui devraient ouvrir tous les tiroirs de la mafia qui a mis le Liban à genoux », espèrent-ils.
Par ailleurs, les plaignants demandent une enquête sur les intermédiaires financiers. Leur plainte, consultée par les médias étrangers, accuse Riad Salamé et quatre membres de son entourage son frère Raja, son fils Nadi, son neveu et une proche collaboratrice à la banque centrale libanaise, Marianne Hoayek d’avoir constitué frauduleusement un riche patrimoine en Europe.
Les associations demandent ainsi à la justice d’enquêter sur la fuite massive de capitaux libanais depuis le début de la crise économique au Liban, l’acquisition de patrimoine immobilier luxueux en disproportion avec les revenus des personnes visées, mais aussi sur la responsabilité des intermédiaires financiers, via des paradis fiscaux et des prête-noms. Selon les plaignants, le patrimoine global de Riad Salamé dépasserait aujourd’hui les 2 milliards de dollars.
« Ses avoirs identifiés au Luxembourg atteignaient 94 millions de dollars en 2018 », souligne la plainte, qui s’appuie notamment sur les révélations du site libanais Daraj.com et les investigations d’une plateforme, l’Organized Crime and Corruption Reporting Project (OCCRP). Des chiffres que Riad Salamé a contestés, affirmant avoir constitué sa fortune à partir d’héritages et de sa carrière dans la finance. Riad Salamé, une des figures les plus conspuées au Liban.
Arrivé à la tête de la banque centrale libanaise en 1993, après avoir œuvré pendant vingt ans comme banquier d’affaires chez Merill Lynch à Beyrouth et à Paris, cet influent personnage a longtemps été salué par la classe politique libanaise et le monde économique. ACP/CL/May