Kinshasa, 22 août 2021 (ACP).- A moins d’un an de l’élection présidentielle au Kenya, la Cour d’appel a confirmé vendredi l’illégalité du processus de révision constitutionnelle, ont annoncé dimanche les médias locaux, ajoutant que cette réforme « Building Bridge Initiative » (BBI) a été engagée par le président Kenyatta en novembre 2019, avec selon lui, l’objectif d’atténuer le système présidentiel actuel du « vainqueur rafle tout » et qui serait à l’origine des conflits post-électoraux.
« Le président n’a pas le pouvoir (…) d’initier des modifications de la Constitution », a conclu le président du tribunal au terme d’une dizaine d’heures de lecture.’’ Un amendement constitutionnel ne peut être initié que par le Parlement ou par initiative populaire’’, a-t-il précisé. En plus de retoquer la proposition de réforme, les sept juges ont estimé que le président Kenyatta pouvait faire l’objet de poursuites civiles pour avoir engagé ce processus.
Uhuru Kenyatta ne peut se présenter à un troisième mandat aux élections d’août 2022, et ses détracteurs estiment que cette réforme avait pour objectif son maintien au pouvoir en tant que Premier ministre. Un maintien à la faveur d’un possible arrangement avec celui qui a été son principal opposant Raila Odinga.
Ce n’est pas la première fois que la Cour prend une décision remarquée. En septembre 2017, avait invalidé les résultats de l’élection présidentielle. Une première sur le continent.
La grande majorité de la classe politique s’est félicitée de cette décision de la cour d’appel saluant l’indépendance de la justice. C’est notamment le cas du vice-président, William Ruto, opposé au projet de réforme depuis le début. Il a salué « le courage des juges qui ont bravement défendu la Constitution », et a appelé à l’union politique dans un discours aux airs de campagne électorale à moins d’un an de la présidentielle, rapporte notre correspondante à Nairobi, Albane Thirouard.
Même tonalité du côté du principal opposant politique Raila Odinga, pourtant à l’initiative de cette réforme. Celui-ci a tweetté qu’il était temps de « passer à autre chose » et a indiqué qu’il se préparerait pour le scrutin.
Reste le Président Kenyatta, qui n’avait toujours pas réagit samedi soir. Ses conseillers juridiques ont toutefois déclaré réfléchir à déposer un recours auprès de la Cour Suprême. Mais plusieurs commentateurs ont fait remarqué – que si un recours était accepté – il n’y aurait pas suffisamment de temps pour organiser un référendum et mettre en place une réforme avant la présidentielle prévue le 9 août 2022.
Le journal The Star titre « Comment les tribunaux ont sabordé le plan d’Uhuru et Raïla pour 2022 ». Le journal s’appuie sur ses sources qui ont confié que Raïla Odinga envisagerait l’organisation d’un référendum, en supposant bien sûr qu’il remporte l’élection présidentielle de 2022, avant d’ajouter que d’autres observateurs estiment que le temps ne permet pas d’organiser un tel scrutin.
Un autre média, Citizen weekly », s’est, lui, plutôt penché sur les juges en titrant « Rencontrez les 7 juges qui ont stoppé la danse du BBI. » Le média en ligne affiche les visages de ces juges, trois femmes et quatre hommes qui, écrit-il, ont attiré l’attention des Kényans après avoir statué pendant une session qui a duré dix heures, avant de rendre leur décision qui juge illégal le processus de révision constitutionnelle voulu par le président Uhuru Kenyatta.
Un autre écrit : « Nous, le peuple, sommes les seuls maîtres du congrès et des tribunaux. Non à la révision de la Constitution, oui à la destitution des hommes qui pervertissent la Constitution. La justice a statué. ». ACP/CL/KJI