L’accord de Washington « ne signifie pas que nous renonçons à la justice » (Ministre congolaise des Affaires étrangères)

Kinshasa, 03 juillet 2025 (ACP).- L’accord de paix signé à Washington entre la République démocratique du Congo et le Rwanda ne signifie pas que la RDC renonce à la justice, a soutenu jeudi la ministre d’État en charge des Affaires étrangères, lors d’un briefing presse organisé à Kinshasa.

« L’accord ne vise pas à humilier un partenaire. Il s’agit d’un compromis diplomatique. Cela ne signifie pas que nous renonçons à la vérité ou à la justice. Les rapports sont accablants. La vérité est connue. Ce que nous devons construire désormais, c’est un écosystème solide capable de garantir que justice soit faite, que les responsabilités soient établies, et que les violations ne se répètent plus », a déclaré Thérèse Kayikwamba Wagner.

Répondant à certaines critiques pointant l’absence d’un volet clair sur la justice dans le texte, la cheffe de la diplomatie congolaise a souligné qu’il ne s’agit pas d’un document exhaustif, mais d’un compromis politique entre deux États souverains.

« Ce n’est pas un accord qui prétend régler tous les problèmes. Il faut le lire comme un texte qui se concentre sur certaines missions prioritaires, mais qui s’inscrit dans un écosystème plus large d’actions et d’initiatives », a-t-elle dit.

Pour elle, la justice ne se réduit pas à ce qui est écrit dans un traité. « Même si cette thématique n’est pas explicitement reprise dans l’accord, elle conserve toute sa valeur. La justice progresse, à travers le débat public, à travers les enquêtes, à travers les mécanismes internationaux », a-t-elle insisté, en rappelant la récente décision du Conseil des droits de l’homme d’envoyer une commission d’enquête internationale.

Présent aux côtés de la ministre des Affaires étrangères, le ministre de la Communication et médias, Patrick Muyaya, a renchéri sur l’importance de cet accord dans la dynamique régionale et le repositionnement diplomatique de la RDC. « N’oubliez pas que ce partenariat est aussi le fruit d’une vision du Président de la République. Le discours qu’il a tenu à Washington marque une ouverture vers une coopération régionale et une prospérité partagée. Ce n’est pas un aboutissement, c’est un engagement à reconstruire notre communauté, à revitaliser nos économies et à restaurer la dignité des victimes », a-t-il indiqué.

M. Muyaya a, en outre, reconnu les défis financiers et logistiques qui ralentissent certains processus, notamment en matière de justice transitionnelle, mais il a réaffirmé l’engagement et la détermination du gouvernement congolais. « La paix, aussi précieuse soit-elle, reste fragile. Elle doit être accompagnée d’actes concrets, de justice, de mémoire et de garanties de non-répétition », a-t-il dit.

Aucun engagement économique prévu dans l’accord

Face aux soupçons de concessions économiques secrètes ou de deals bilatéraux sous influence étrangère, la cheffe de la diplomatie congolaise a précisé qu’aucun engagement économique n’est prévu dans l’accord de Washington.

« L’accord ne prévoit ni contrepartie économique, ni engagement économique contraignant entre la RDC et le Rwanda », a-t-elle déclaré. Une mise au point destinée à rassurer l’opinion publique congolaise et les partenaires internationaux sur l’absence de toute transaction commerciale dissimulée derrière ce texte diplomatique.

« Je tiens à préciser avec clarté que cet Accord de Paix n’est ni un accord économique entre la RDC et les États-Unis, ni un accord bilatéral commercial entre la RDC et le Rwanda », a renchéri Mme Kayikwamba, faisant référence au rôle des États-Unis dans la signature de l’accord.  

Selon elle, il s’agit avant tout d’un engagement politique et sécuritaire, centré sur le respect de la souveraineté nationale, la cessation des hostilités, le retrait des forces étrangères, la fin du soutien aux groupes armés et le retour durable de la paix dans l’Est de la RDC.

Un autre point important soulevé par la ministre a été celui relatif à la gestion des groupes armés, pour lequel Thérèse Kayikwamba a fermement écarté toute idée d’intégration automatique ou d’amnistie dissimulée. « Nous ne sommes pas dans une logique d’intégration généralisée des groupes armés. Celle-ci se fera sur la base de critères d’aptitude morale et physique, mais également à la lumière des leçons tirées du passé », a-t-elle souligné.

« Après la signature de l’accord de paix à Washington, c’est maintenant que le vrai travail commence. C’est un travail qui nous concerne tous en tant que Congolais et Congolaises, en tant que citoyens engagés. Que nous soyons membres du gouvernement, que nous soyons membres de la société civile, de la presse ou citoyens engagés et épris du souci de voir la paix se matérialiser dans notre pays, notre travail à nous tous commence maintenant, à commencer par l’appropriation de cet accord, sa compréhension, sa lecture évidemment », a conclu la ministre d’Etat aux Affaires étrangères.

A travers cet exercice de redevabilité, l’Exécutif congolais a bel et bien commencé le travail de sensibilisation de l’opinion publique au contenu et aux enjeux de l’accord de paix signé le 27 juin dernier à Washington. ACP/C.L.

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