Kinshasa, 12 juin 2024 (ACP)-. L’Assemblée nationale a investi le gouvernement Judith Suminwa, mecredi à l’aube, à l’issue d’une plénière de la chambre basse du Parlement de la République démocratique du Congo (RDC) qui aura duré plus de quatre heures. L’investiture de l’équipe Judith Suminwa est intervenue après l’adoption d’une motion d’approbation votée par les députés nationaux.
« La résolution que la plénière vient d’adopter est un acte conforme au règlement intérieur par lequel l’Assemblée nationale approuve le programme d’un gouvernement », a déclaré Vital Kamerhe, président de la chambre basse du Parlement.
Auparavant , les députés nationaux ont approuvé, à une majorité écrasante, le programme 2024-2028 du gouvernement Judith Suminwa avec un total de 397 députés nationaux sur 405 votants qui se sont exprimés pour le programme, huit élus nationaux qui se sont abstenus contre zéro voix contre le programme défendu devant les députés nationaux par la cheffe du gouvernement Judith Suminwa.
Réagissant aux questions des membres de l’Assemblée nationale, Mme Judith Suminwa a rassuré la plénière de la prise en compte, par son gouvernement, de toutes les préoccupations des députés nationaux qui ont , notamment tourné autour de la priorité à accorder à la sécurisation du territoire national, au renforcement des effectifs de la Police nationale, la priorité accordée au secteur de l’emploi, la création de plus d’emplois possibles en RDC, le renforcement de quelques entreprises publiques, la valorisation des ressources forestières mais aussi l’instauration d’une politique salariale. Dans ses réponses, la Première ministre a également fixé les députés nationaux sur la détermination de son gouvernement à faire la sécurité priorité des priorités, la poursuite du programme local de 145 territoires, procéder à la diversification de l’économie nationale.
« L’Assemblée nationale s’engage à procéder à des contrôles responsables des actions du gouvernement », a prévenu Vital Kamerhe.
Le programme quinquennal s’élève à 92,9 milliards USD
Le programme du gouvernement de la République démocratique du Congo (RDC), présenté mardi par la Première ministre à l’Assemblée nationale est chiffré à 92,9 milliards USD et basé sur les engagements majeurs du quinquennat du Président Tshisekedi. « Le programme que nous vous présentons est chiffré à 277.066,2 milliards de CDF, soit 92,9 milliards USD pour une période de cinq ans », a déclaré Mme Judith Suminwa Tuluka, Première ministre. Elle a relevé les six piliers majeurs sur lesquels repose l’action de son programme gouvernemental, à savoir la création de plus d’emplois, la protection et renforcement du pouvoir d’achat des ménages congolais, la construction d’une économie plus diversifiée et plus compétitive, l’accès aux services de base, le renforcement de l’efficacité des services publics ainsi que la protection des citoyens congolais.
« De ce programme quinquennal, le coût annuel moyen serait de 55.413,2 milliards de CDF. Tous ces coûts seront totalement couverts par des ressources étatiques et non étatiques, du pouvoir central et des provinces, ainsi que des Entités territoriales décentralisées (ETD) », a-t-elle précisé. « En termes des opérations financières de l’Etat, le budget du Programme d’actions du gouvernement dégagera des déficits budgétaires annuels moyens de 9.603,6 milliards de CDF complètement financés par des sources de financement saines. Dans le souci d’éviter le piège de l’endettement et divers retards de décaissement des partenaires de l’Etat, l’accroissement des ressources internes du budget de l’État et les économies liées à la rationalisation des dépenses seront au centre de la stratégie de financement du Programme d’actions du gouvernement », a expliqué la Première ministre. Elle a rassuré que les partenariats publics-privés et/ou les échanges des ressources naturelles du pays continueraient à financer les grands projets industriels et infrastructurels.
Sécurité : appel à un sursaut patriotique
Face à l’agression dont la République démocratique du Congo est victime dans sa partie Est de la part du Rwanda, Judith Suminwa a galvanisé la population en réaffirmant l’intention de la Nation à ne pas se laisser faire. « Nous sommes les descendants de Kimpa Vita et de Kimbangu ; nous sommes la patrie de Kasa-Vubu et de Lumumba, rien ni personne ne doit nous faire reculer ni nous faire trembler », a-t-elle lancé d’un ton ferme, affirmant que la « République démocratique du Congo se défendra, face à nos agresseurs, ainsi qu’à leurs complices, ceux qui massacrent tous les jours nos paisibles populations, qui décapitent nos enfants, nos frères, qui violent nos sœurs, nos mamans, qui pillent nos richesses. Tôt ou tard, ils répondront de leur barbarie et de leurs crimes devant la justice ».
Elle a affirmé la ferme volonté de son gouvernement à travailler pour le retour de la paix dans l’Est du pays et à poursuivre le Programme de désarmement, démobilisation, relèvement communautaire et stabilisation (P-DDRCS). « A vous qui êtes les représentants de nos populations de l’Est du pays qui vivent les affres de la guerre, la peur au ventre, je voudrais ici indiquer notre ferme volonté à œuvrer pour le retour de la paix durable dans la partie Est de la République démocratique du Congo (…) Dans le même souci de garantir une paix durable, votre gouvernement s’engage à poursuivre le Programme de désarmement, démobilisation, relèvement communautaire et stabilisation (P-DDRCS) et à mettre à la disposition les ressources nécessaires», a promis Judith Suminwa.
Consciente du défi qui attend son Gouvernement sur le plan sécuritaire, la Première ministre compte implémenter des actions importantes pour pacifier les zones touchées par l’insécurité. « Sur le plan sécuritaire, notre pays est confronté à une situation précaire qui demande une action urgente, notamment dans le Nord-Kivu où l’armée rwandaise, sous couvert du mouvement rebelle M23, continue de fragiliser le tissu socio-économique en occupant des parties des territoires de Rutshuru, Masisi et Nyiragongo», a dit Judith Suminwa, soutenant que «la présence de groupes armés étrangers et locaux en Ituri, au Sud-Kivu, au Maniema et au Tanganyika a encore exacerbé l’insécurité et perturbé la coexistence pacifique de la population congolaise ».
Elle a, en outre, promis de poursuivre la montée en puissance des Forces de défense et de sécurité, ce qui devra passer, notamment par le financement desdites forces, l’opérationnalisation de la loi de programmation militaire, la mise en œuvre de la loi instituant la Réserve armée de la Défense, le financement et élaboration de la loi de programmation de la Police nationale congolaise (PNC), en vue de professionnaliser ce service face à sa mission d’éradiquer l’insécurité urbaine et rurale.
Justice : engagement à améliorer l’appareil judiciaire
Pour faciliter l’accès à la justice, la Première ministre Judith Suminwa s’est engagée à travailler à l’amélioration de l’appareil judiciaire de la République démocratique du Congo, sans lequel on ne peut parler d’un État de droit. «L’engagement de renforcer l’autorité de l’État, de promouvoir l’État de droit et la démocratie n’est qu’un vœu pieux sans un appareil judiciaire restauré et sécurisé. Il est donc impérieux d’améliorer le fonctionnement de l’appareil judiciaire et de veiller à la bonne administration de la justice d’une part, et d’autre part, d’améliorer les conditions de vie et de travail des magistrats et du personnel judiciaire», a dit la Cheffe du gouvernement.
Pour permettre aux plus démunis de bénéficier de la justice, « le Gouvernement mettra en place un fonds d’aide judiciaire, en vue de faciliter l’accès à la justice pour les plus démunis et les personnes en situation de vulnérabilité. Il poursuivra l’amélioration progressive des conditions salariales et de travail du personnel judiciaire et dynamisera le fonctionnement des chambres disciplinaires du Conseil supérieur de la Magistrature», a-t-elle promis.

De l’économie informelle à l’économie formelle
La Première ministre a révélé des stratégies susceptibles de faire passer l’économie de la République démocratique du Congo de l’informelle vers une économie formelle. « Le gouvernement compte élaborer une stratégie visant à encourager le passage de l’économie informelle à l’économie formelle en simplifiant les processus de reconnaissance légale, en instaurant un régime fiscal approprié et en renforçant la relation entre la formation et l’emploi, notamment par le biais d’une subvention pour l’embauche du premier jeune diplômé d’un programme de formation professionnelle, financé par le budget de l’Etat », a indiqué la cheffe du Gouvernement.
Elle a cité, en outre, le partenariat public-privé (PPP), la création des centres de coaching des petites entreprises et l’accès au crédit pour les PME du programme grâce à des lignes de crédit supervisées par le Fonds de garantie de l’entrepreneuriat au Congo (Fogec). Le programme économique du gouvernement, a dit la Première ministre, mettra en œuvre, à court terme, des mesures d’atténuation pour stabiliser le cadre macroéconomique et réduire le coût de la vie, et celles d’augmentation des revenus des travailleurs tant du secteur public que privé. « Ce programme accompagnera des initiatives plus structurelles visant à diversifier l’économie et à améliorer la productivité du pays », a soutenu Mme Suminwa.
Création de 2,6 millions d’emplois en faveur des jeunes
La Première ministre a annoncé la détermination de son gouvernement à se lancer dans la création et le développement des petites et moyennes entreprises à travers des politiques de soutien et des programmes d’accompagnement. «Votre gouvernement envisage ainsi de créer 2,6 millions d’emplois par ce programme. Placé sous la coordination des ministères de l’Économie nationale et de l’Industrie et des PME, ce programme consistera, en partenariat avec le secteur privé, à regrouper dans les villes de plus de 1 million d’habitants, en commençant par Kinshasa, Lubumbashi et Kisangani, les corps de métiers qui travaillent aujourd’hui en plein air, sans accès au crédit ou à toute autre forme d’appui de la part de l’État, pour leur faire bénéficier des avantages susceptibles d’accélérer leur formalisation », a annoncé Judith Suminwa aux élus nationaux.
« Pour absorber les dizaines de milliers de jeunes qui arrivent sur le marché du travail chaque année et réduire le niveau de sous-emploi, les estimations montrent qu’au vu de la jeunesse de notre population, notre économie devrait créer en moyenne environ 1,5 millions emplois par an sur la période de 2024 à 2030 », a promis la Première ministre.

Aménager le territoire national pour stimuler la croissance économique
Pour Mme Suminwa, l’aménagement du territoire joue un rôle essentiel dans la stimulation de la croissance économique et l’amélioration de la qualité de vie de la population. « La modernisation des infrastructures de transport et l’aménagement du territoire jouent un rôle essentiel dans la stimulation de la croissance économique, l’amélioration de la qualité de vie et la promotion du développement durable », a-t-elle dit. Elle a fait savoir que son gouvernement compte investir dans les infrastructures de transport dans le but de favoriser de la mobilité et développer des modes de déplacement multimodaux, d’améliorer l’accès au service de transport et voies de communication pour assurer la mobilité des personnes et des biens ainsi que l’inter-connectivité des territoires. « Dans le cadre des infrastructures, votre gouvernement s’engage à accélérer la construction du port en eaux profondes de Banana, la construction de 10 mille kilomètres de routes de desserte agricole par an », a affirmé Mme Suminwa.

Environnement : gérer de manière responsable l’écosystème
Pour la lutte contre les changements climatiques, le gouvernement Suminwa tient à une gestion durable et responsable des ressources en eaux et à honorer les engagements internationaux relatifs à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. « En ce qui concerne la gestion des forêts et des eaux, le gouvernement va poursuivre des réformes stratégiques pour la gestion durable des forêts, avec l’objectif d’atteindre la neutralité carbone et de mettre la RDC en situation de jouer pleinement son rôle de pays-solution », a souligné la Première ministre. « Grâce à ses vastes forêts, sa riche biodiversité, ses abondantes ressources en eau, son potentiel hydroélectrique et ses importantes ressources minières, la RDC se positionne comme un acteur clé dans la lutte contre les défis posés par le changement climatique à l’échelle mondiale », a-t-elle ajouté. Pour réagir à la présentation du programme du gouvernement Suminwa, trois cent vingt-cinq (325) demandes d’intervention des députés ont été enregistrées par le bureau de l’Assemblée nationale. ACP/