Kinshasa, 08 novembre 2021 (ACP).- Le président de la République, Félix Tshisekedi, a témoigné lundi, dans la salle de congrès du palais du peuple, dans la commune de Lingwala, du grand intérêt qu’il porte au bon fonctionnement de l’appareil judiciaire congolais, à travers son assistance à l’audience solennelle et publique de la rentrée judiciaire du Conseil d’Etat, présidée par son premier président, Pr Félix Vunduawe Te Pemako.
Le premier président du Conseil d’Etat qui a placé son discours sous le thème « Le référé administratif, un instrument légal pour la sécurité juridique de l’administré dans l’état de droit », a commencé par livrer le contexte dans lequel le Conseil d’Etat est né. « A la suite de l’éclatement de la Cour suprême de justice 50 ans après, la RDC a fini par se doter d’une nouvelle Cour suprême de justice en matière administrative pour juger les litiges opposants d’une part, le citoyen avec l’administration et d’autre part, les administrations publiques entre elles ; bien sûr aux cotés de la Cour de cassation qui est une autre cour suprême de justice en matière judiciaire , c’est-à-dire pour des différents intéressants les relations entre citoyens par rapport à leurs statuts, leurs patrimoines et à l’ordre public. Ces deux Cours fonctionnent à côté de la cour constitutionnelle», a renseigné le premier président.
Aujourd’hui, a-t-il indiqué, seul le conseil d’état est effectivement installé et fonctionne depuis 2018 et, en attendant l’installation effective d’autres juridictions administratives ordinaires, les Cours d’appels exercent les compétences dévolues aux cours administratifs d’appels et aux tribunaux administratifs.
Revenant sur le thème jour, le premier président a justifié son choix dans la mesure où la nécessité de satisfaction de l’intérêt général caractérise le but poursuivi par l’administration publique dans la réalisation de ses missions. « Cette nécessité a valu à l’administration publique des privilèges à savoir : le privilège du préalable, la possibilité pour l’administration de rendre exécutoire ses propres décisions sans recourir au juge, le privilège d’exécution d’office, possibilité pour l’administration d’obtenir l’exécution de ses décisions nonobstant tout recours ; et si nécessaire le privilège d’exécution forcée, possibilité reconnue à l’administration de recourir à la puissance publique », a-t-il poursuivi.
Il a souligné que la procédure en référé résulte donc non seulement de la protection des droits et libertés fondamentaux, mais aussi de la bonne administration de la Justice. « En effet, les actes, décisions ou règlements administratifs conservent toujours leur caractère exécutoire, dès leur entrée en vigueur, c’est-à-dire à partir de leur signature. Cependant, ils ne s’appliquent immédiatement qu’à partir de leur opposabilité, lorsque leur publicité est acquise, soit par publication, soit par notification », a-t-il dit, ajoutant que la procédure de référé concrétise ainsi, en réalité, la volonté du constituant selon laquelle ‘’ nul n’est tenu d’exécuter un ordre manifestement illégal ‘’.
Le référé est en définitive un moyen légitime à opposer à tout ordre illégal
Le premier président a, par ailleurs, démontré que le référé est en définitive un moyen légitime à opposer à
tout ordre illégal, pour une société civilisée. Il est une nouvelle matière en droit congolais, il faut l’admettre, que la plupart de nos juristes ne maîtrisent pas encore.
Car, c’est maintenant seulement, a-t-il précisé, que le législateur organique du 15 octobre 2016 a introduit une procédure de référé administratif, en cas d’urgence, parmi les douze options nouvelles retenues, lors de la grande réforme du contentieux administratif congolais.
Enfin, il a souligné que cette réforme judiciaire de 2016 a finalement mis l’accent surtout sur la spécialisation de fonction du juge, entraînant celle des avocats, près les juridictions de l’ordre administratif, à partir de l’institution par la Constitution du 18 février 2006, du Conseil d’Etat, des cours administratives d’appel et des tribunaux administratifs. « Il faut retenir que la procédure de référé en cas d’urgence n’est donc organisée qu’au niveau de ces juridictions administratives de droit commun », a-t-il conclu.
Analyse du même thème par le Procureur près le Conseil d’Etat
Abordant le même thème que le premier président, le Procureur près le Conseil d’Etat, Octave Ntela, l’a subdivisé en trois points.
Dans le premier, il a présenté les notions générales en abordant d’une part, les définitions des référés et leur classification respectives : référé civil et référé pénal, et d’autre part, le référé administratif en esquissant une définition et en indiquant le but du référé ainsi que l’évolution historique dudit référé en droit français et belge.
Au deuxième point, le Procureur présenté les trois types des référés administratifs, à savoir les référés généraux, les référés particuliers et les référés spéciaux. De leur analyse, il se dégage que les référés généraux se subdivisent en référés suspension, liberté et conservatoire, mais la réalité du prétoire atteste que les requêtes en référés suspension et liberté sont les plus diligentées devant le Conseil d’Etat.
Pour lui, il y a lieu de relever qu’il est tout à fait indiqué qu’une procédure d’urgence comme celle des référés puisse prévoir des voies de recours susceptibles d’affecter le principe de la célérité. En effet, les ordonnances rendues en matière des référés peuvent être entachées d’erreur ou d’injustice, lesquelles doivent être impérativement corrigées ou réparées.
La procédure du référé, début d’un changement dans contentieux administratif congolais
Aujourd’hui et désormais plus que jamais, a insisté le Procureur près le Conseil d’Etat dans sa mercuriale, le référé se trouve au cœur du contentieux administratif congolais. Le vent du changement est en train de souffler. La révolution dans le secteur de la justice administrative est résolument en marche. « Le train du renouveau a déjà quitté la gare à la conquête de nouveaux horizons et de nouveaux espaces, à l’assaut de nouveaux défis, les uns toujours plus excitants et déterminants que les autres (…). La procédure des référés demeure une avancée majeure dans la protection des administrés face à la toute puissante Administration », a-t-il poursuivi.
Le Procureur Octave Ntela a traité au troisième point, des décisions du juge et de leur exécution, indiquant à ce propos que les décisions en cette matière sont des ordonnances rendues dans le plus bref délai et qu’elles ne préjugent pas du fond. Quant à leur exécution, il a mis le focus sur la procédure y relative et sur l’illustration des quelques cas d’exécution ainsi que les difficultés rencontrées.
Auparavant, le bâtonnier national, Gérard Balanda Mik’uin Leliel, avait abordé un thème axé sur « Les expressions relatives aux ministères des avocats devant e conseil d’état et la cour de cassation, la problématique de l’exécution des décisions et des actes de justice ».
Cette rentrée judiciaire du Conseil d’Etat intervient après celles de la Cour Constitutionnelle et de la Cour de Cassation, rappelle-t-on.
ACP/