Pour une critique objective des concerts au Stade des Martyrs (Par Jordache DIALA)

Kinshasa, 30 juin 2023 (ACP).-  Le stade des Martyrs de la Pentecôte a abrité, ces deux dernières années, une série de spectacles de musique par les stars de la Rumba congolaise qui constituent des matières à critiques pour la chronique musicale. Hélas ! Cette critique n’est basée que sur l’affluence du public à chaque rendez-vous, selon certains chroniqueurs, a constaté l’ACP.

Tout est parti du concert de réconciliation avec les leaders du légendaire groupe congolais Wenge Musica 4×4, en juin 2022. Il s’en est suivi la prestation de Fally Ipupa en octobre et celui d’Héritier Watanabe en décembre de la même année.

L’épopée stade de Martyrs se poursuit en 2023 avec le chanteur Ferré Gola qui a réussi son passage le 24 juin dernier.

Pour le congolais lambda, le temple omnisports de la capitale est devenu le baromètre, mieux l’unité de mesure pour évaluer la popularité ainsi que la force de l’un ou l’autre en termes de capacité de mobilisation des fans. Ils pensent que la réussite d’un concert se justifie à priori par le nombre de personnes qui sont venues au stade et non à la qualité du spectacle présenté par l’artiste sur la scène ou mieux encore à la dimension artistique de l’évènement dans son ensemble.

Curieusement, les chroniqueurs de musique sont aussi tombés dans cette conception des choses. Sans trop réfléchir, ils soutiennent cette thèse en lieu et place de faire réellement leur travail de critique d’art. Or, le fait de remplir le stade n’est pas synonyme d’avoir fait de la bonne musique, ni même d’avoir offert un spectacle de qualité.

 La musique n’est pas l’art de faire le « plein »

Vouloir jouer au stade des Martyrs est un défi qu’un artiste musicien congolais se lance, tout en sachant que cette enceinte a une capacité d’accueil de 80 000 places assises.

L’objectif consiste à réunir plus de 40.000 spectateurs, car si on veut faire moins, vaut mieux ne pas choisir ce temple omnisport de la Capitale.

Faire le plein n’est pas forcément le challenge à relever pour l’artiste. Remplir le stade n’est pas l’impératif, mais faire moins de la moitié de sa capacité n’est pas acceptable non plus, parce qu’on a toujours la liberté de choisir un endroit plus petit.

L’autre problème, ce sont les fans, pour qui, le défi, c’est de faire le plein afin de démontrer le succès de leur idole. Et cela depuis qu’un autre artiste a rempli le stade.

Ce défi est lancé par les fans et certains médias à chaque musicien qui décidera de jouer dans ces lieux. Conséquence : il sera contraint de faire avec.

Or sur scène, la star ne vient pas sur le podium pour défendre le plein mais plutôt son art.  Car, la musique n’est pas l’art de faire le plein.

Tous ces aspects échappent curieusement aux chroniqueurs de musique qui ne voient que le facteur plein.

Toute œuvre d’art mérite d’être critiquée.  Mais cette critique doit être constructive dans l’objectif de pousser à l’amélioration d’un travail professionnel. Malheureusement, nos chroniqueurs excellent dans les critiques orientés et tendancieuses. En regardant certaines émissions sur Internet et antennes de télévision, la plupart des chroniqueurs tirent vers le bas notre réflexion collective sur la culture, précisément quand ils parlent de la musique.

Ils participent à l’abrutissement d’une partie de la population, en particulier les jeunes. Cette situation est préoccupante car la musique est l’art qui peut unir la population, qui peut contribuer à baisser les tensions sociales, mais elle est utilisée par certains chroniqueurs pour créer des conflits entre fans qui se radicalisent et alimentent la polémique.

Non à la chronique de la haine

Des chroniqueurs partisans et irresponsables font l’apologie de la division et de la haine en lieu et place d’encourager une concurrence loyale.  Ils agissent comme des pyromanes. Les feux qu’ils allument ici et là fument encore, car jamais éteints complètement, il suffit d’un rien pour qu’ils repartent de plus belle. Chose grave, ils alimentent la colère haineuse en opposant les adeptes de Fally, Wenge, Ferré et tant d’autres au même moment.

Certains de ces analyses multiplient des débats de caniveaux, qui interdisent d’être rationnels. Ils laissent parfois les fans exceller dans des messages de haine, des insultes à un artiste et ils excellent dans l’art de l’invective.

Dans le domaine des arts et cultures, le rôle du chroniqueur est d’analyser, critiquer et promouvoir une œuvre et le talent du créateur (artiste), en tenant de son apport positif dans l’émergence de la société ou de la communauté.  

Pour les productions au stade des Martyrs, il est rationnel pour le musicien de ne défendre que son art et son savoir-faire. Ce qui veut dire d’abord, arriver à satisfaire les mélomanes par la bonne musique.  

C’est sur cet aspect que les chroniqueurs de musique doivent baser leurs critiques, avec des observations purement artistiques en relevant quelques points faibles de la prestation scénique. Sans négliger également certains points essentiels (sécurité, communication, billetterie…) qui s’impliquent et accompagnent à l’organisation de l’événement. Donc, la critique ou le débat ne devrait pas se limiter sur le plein.

Chaque artiste à son public, son histoire et ses objectifs.

Qui dit mieux . ACP/CL  

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