Kinshasa, 10 mars 2025 (ACP).– Le Président ghanéen John Dramani Mahama a estimé, lundi, la nécessité d’une médiation entre la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et l’Alliance des Etats du Sahel (AES), dont le divorce a été acté le 29 janvier dernier, ont informé les medias internationaux. « J’estime qu’il était encore possible de trouver un terrain d’entente entre les deux parties, et j’espère sans doute à des avancées concrètes à cette démarche », a déclaré John Dramani Mahama.
Lors de sa tournée en faveur du Mali, Niger et Burkina Faso, le nouveau chef de l’Etat ghanéen a tenté la médiation de la dernière chance entre les deux organisations ouest-africaines. Selon les mêmes sources, le président ghanéen semble avoir trouvé une écoute attentive auprès de ses homologues burkinabé Ibrahim Traoré, malien Assimi Goïta et nigérien Abdourahamane Tiani.
Avant même d’être investi, le président Mahama avait envoyé quelques signaux forts aux trois pays qui avaient décidé de se retirer de manière concertée et concomitante de la CEDEAO en janvier 2024. A peine investi le nouveau président s’est ensuite démarqué des sanctions infligées par la CEDEAO au Mali en 2022 et au Niger.
Selon lui, ces sanctions, qui avaient notamment inclus embargo aérien et terrestre, interdiction des transactions commerciales et le gel des avoirs des deux pays à la Banque centrale ouest-africaine, avaient été contreproductives et disproportionnées. Autre geste fort en direction des Etats de l’AES, le nouveau président ghanéen avait désigné parmi ses premières nominations le militaire à la retraite et ancien chef de la lutte antiterroriste Larry Gbevlo-Lartey comme envoyé spécial pour les Etats du Sahel.
A Bamako, Ouagadougou et Niamey, ces gestes ont été favorablement accueillis. Au cours de sa tournée expresse, le président ghanéen a eu de longues séances de travail avec ses hôtes qu’il a tenté de convaincre de reconsidérer leur décision de quitter la CEDEAO. Même si rien n’a encore filtré des entretiens que le président Mahama a eus dans les trois capitales de l’AES, il est à craindre que son initiative arrive bien trop tard.
Après que leur décision de retrait a été actée le 29 janvier 2025, les trois pays ont mis en circulation un passeport commun de l’AES. Ils ont ensuite procédé lundi 3 mars 2025 à la montée concomitante du drapeau de l’AES dans leurs capitales respectives. Les couleurs de l’AES flottent désormais à côté des drapeaux nationaux sur les édifices officiels et dans les espaces publics.
Après l’organisation des exercices militaires conjoints en mai 2024 à Tahoua, dans le nord-ouest du Niger, la transformation de l’Alliance des Etats du Sahel en Confédération de l’Alliance des Etats du Sahel en juillet 2024 à Niamey, la montée concomitante du drapeau de l’AES à Ouagadougou, Bamako et Niamey représente une étape supplémentaire dans la structuration de la toute nouvelle organisation.
Pour beaucoup, les trois pays ont atteint désormais un point de non-retour qui pourrait compliquer voire rendre impossible le succès de l’initiative du président ghanéen. Il a également affirmé que ce tour d’horizon de la coopération est aussi pour lutter contre le terrorisme et pour développer les relations économiques.
La CEDEAO dans la tourmente
Et pour ne rien arranger, les démarches du président ghanéen arrivent alors que la CEDEAO connaît une nouvelle tempête politique provoquée par la décision du président bissau-guinéen Umaro Sissoco Embalo de ne pas quitter le pouvoir au terme de la fin légale de son mandat. Selon la Cour suprême de Guinée-Bissau, le mandat du président Embalo devrait prendre fin le 4 septembre 2025.
Faisant fi de cet avis de la plus haute juridiction de son pays, le président bissau-guinéen a fixé la tenue de la présidentielle pour le 23 novembre 2025, soit bien au-delà de la date de son mandat. Il a par ailleurs indiqué qu’il sera candidat à sa propre succession alors qu’il avait publiquement annoncé en septembre 2024 qu’il ne solliciterait pas de second mandat.
Président en exercice de la CEDEAO entre 2022 et 2024, le président Embalo avait pourtant fait la leçon de démocratie aux pouvoirs militaires du Sahel après les coups d’Etat de mai 2021 au Mali, de septembre 2022 au Burkina Faso et de juillet 2023 au Niger. En dépit de bons arguments de persuasion que pourrait avoir mobilisés le président ghanéen, il n’est pas sûr que les Etats de l’AES veuillent revenir dans une CEDEAO désormais moribonde.
choix stratégique
En toile de fond donc, le cœur de ces voyages officiels de John Dramani : la volonté annoncée de réintégrer les trois Etats de l’AES au sein de la CEDEAO. Boucler cette tournée régionale à Ouagadougou, c’est aussi un choix stratégique et une marque d’amitié du président ghanéen, car c’est avec Ibrahim Traoré que s’est enclenché ce processus diplomatique. Invité comme ses homologues du Mali et du Niger , le capitaine burkinabè est le seul à avoir fait le déplacement à Accra le 7 janvier pour l’investiture de John Dramani Mahama qui. Car pour le moment, la situation semble bloquée à l’issue des deux premières étapes de cette tournée.
ACP/