Kinshasa, 05 juillet 2024 (ACP).- En République démocratique du Congo (RDC), les femmes représentent plus de la moitié de la population, soit plus de 50% sur une population totale estimée à près de 100 millions d’habitants.
Le 30 juin 1960, lorsque le pays accède à l’indépendance, Sophie Kanza (Jeune sœur de Thomas Kanza et épouse de Marcel Lihau) était la seule femme à avoir intégré l’école secondaire. Elle deviendra également la première femme ministre.
Cependant l’évolution notable de la participation des femmes à la vie publique en RDC depuis l’accès du pays à sa souveraineté nationale et internationale reste encore en deçà des attentes. La lutte pour «l’indépendance des femmes en RDC» est loin de se terminer, en dépit du chemin parcouru et des avancées significatives remarquées en 64 ans.
Les conditions de la femme congolaise sont doublement affectées par le faible niveau de développement du pays et par la persistance de fortes inégalités avec les hommes. Les inégalités de genre sous-tendent de nombreux problèmes qui touchent de manière disproportionnée les femmes et les filles, notamment les violences domestiques et sexuelles, de faibles rémunérations, l’accès inéquitable à l’éducation, et des soins de santé insuffisants, en plus de leur calvaire comme cibles dans les conflits armés.
Selon ONU-femmes, plus de la moitié des femmes congolaises (52 %) sont victimes de violences domestiques, et 39 % des femmes congolaises déclarent avoir été menacées ou blessées dans leur vie.
Emancipation politique
La lutte politique des femmes en RDC a commencé bien avant l’indépendance, avec l’éveil précoce observé déjà au 18ème siècle. C’est le cas de Kimpa Vita qui avait lancé un mouvement de contestation politico-religieux contre les blancs qui armaient des Royaumes rivaux pour précipiter l’effondrement du Royaume Kongo, dans le sud-ouest du pays.
Plus tard, avec le Décret du 12 février 1965 portant protection des intérêts de la femme en cas d’abus du mari, la femme reçoit une émancipation octroyée par le législateur. De même, la Constitution de 1967 qui a donné à la femme le droit de participer au référendum, en ses articles 9 à 35 stipulant : « l’égalité de tous devant la loi ».
L’implication politique timide des femmes se fait sentir en 1990, à la Conférence nationale souveraine où l’on compte 168 femmes sur 2800 délégués. Et la lutte pour la plus grande participation politique des femmes intervient, notamment en 1998, avec la création du Conseil national de la femme pour mettre en pratique le plan d’action de Beijing, en 1999 avec le Programme national pour la promotion de la femme, en 2021 avec la création de quelques mouvements sociaux féminins ainsi qu’en 2016 avec la promulgation de la loi sur la parité et du code de la famille révisé.
La part positive du Président Tshisekedi
Il faut retenir que depuis son accession à la tête du pays, en janvier 2019, le Président Félix Tshisekedi Tshilombo contribue à l’égalité du Genre. Il a même été nommé « champion de la masculinité positive de l’Union africaine » à l’issue du sommet des chefs d’Etats et des gouvernements d’Afrique, pour son combat pour la parité, pendant qu’il occupait le poste de président de l’Union Africaine.
Parmi ses réalisations en faveur de la femme, l’on compte les nominations, pour la première fois, d’une femme Première Ministre, d’une femme à la tête de la Banque Centrale du Congo, d’une autre à la tête du ministère des affaires étrangères, et tant d’autres dans les ministères clés et comme mandataires publics.
Dans la sphère professionnelle, les femmes ont gagné en visibilité et en reconnaissance depuis lors. Elles occupent désormais des postes de direction, dirigent des entreprises et contribuent de manière significative à l’économie.
L’écart salarial, une stigmatisation muette
En 64 ans de souveraineté, les inégalités des salaires entre les hommes et les femmes reflètent une réalité profondément enracinée dans les structures sociales et économiques du pays. Le rapport du PNUD de 2009 note de fortes inégalités de salaire en RDC, avec un coefficient de Gini (un indicateur de dispersion permettant principalement d’apprécier les inégalités dans la distribution des richesses d’un pays où d’un territoire) de 0, 40.
Selon Me Belinda Luntadila, experte en droit familial, droit du travail et droit numérique, en RDC, l’inégalité des salaires entre les hommes et femmes est un problème persistant. Les femmes sont souvent payées moins que les hommes pour un travail équivalent ou similaire.
« Les facteurs contribuant à cette disparité incluent la discrimination basée sur le genre, les normes culturelles défavorables aux femmes dans le milieu professionnel, ainsi que l’accès inégal à l’éducation et aux opportunités d’emploi », a-t-elle déclaré.
La maternité aussi est un facteur de disparité salariale. Le Code de travail congolais, en son article 130 alinéas 2 dispose : « pendant la période de maternité que l’enfant vive ou non, la femme salariée a droit aux deux tiers de sa rémunération ainsi qu’au maintien des avantages contractuels ». La réduction du salaire des femmes pendant la période de congé de maternité qui est de plus de trois mois pénalise leurs carrières de mères et déstabilise leur niveau de vie alors que la charge vient d’augmenter.
De plus, les harcèlements sexuels constituent également un des facteurs d’écart salarial entre l’homme et la femme
Situation économique des femmes en RDC
Actuellement, les Congolaises occupent cependant une place majeure dans le système économique, même si toutes les professions ne leur sont pas ouvertes. Elles représentent 46% de la population active, 70% de la main-d’œuvre et elles sont responsables de 60 à 80% de la production vivrière et de 100% de la transformation des produits agricoles.
La femme congolaise œuvre principalement dans le secteur primaire où les revenus ne sont pas substantiels par rapport aux salaires. De surcroît, dans la plupart d’unités de production, la femme s’est fait recenser comme « aide familiale » et n’a pas accès à la propriété. Au village, elles participent activement aux travaux des champs, notamment aux récoltes, et sont très présentes sur les marchés où elles commercialisent les produits de la ferme.
Si les femmes entrepreneures constituent une partie significative du tissu économique congolais (plus de 43% des entreprises hors secteur agricole sont portées par des femmes), elles restent caractérisées par l’informel et l’entrepreneuriat individuel. ACP/C.L.