Discours raciste : La Banque mondiale suspend jusqu’à nouvel ordre de partenariat avec la Tunisie

Kinshasa, 07 mars 2023 (ACP).- La Banque mondiale a décidé de suspendre jusqu’à nouvel ordre son cadre de partenariat avec la Tunisie, jugeant complètement inacceptables les propos du président tunisien Kais Saïed qui, en dénonçant fin février des hordes de migrants clandestins, a attisé selon l’institution financière la violence à leur encontre, ont rapporté mardi des médias étrangers.

« Les commentaires publics qui attisent la discrimination, les agressions et les violences racistes sont complètement inacceptables» a jugé le président de l’institution, David Malpass, dans un courrier adressé dimanche soir à ses équipes.

Face à la dégradation et aux agressions rapportées, M. Malpass estime que la Banque mondiale n’est pas en mesure de poursuivre ses missions sur place, la sécurité et l’inclusion des migrants et des minorités faisant partie des valeurs centrales d’inclusion, de respect et d’antiracisme de la Banque.

« Compte tenu de la situation, la direction a pris la décision de mettre en pause cet accord de partenariat et de retirer du calendrier la revue du conseil d’administration » (CA) de la Banque mondiale, prévue initialement le 21 mars et « reportée jusqu’à nouvel ordre », ont rapporté les mêmes sources.

Cette décision concerne le cadre de partenariat pays (CPF en anglais), qui sert de base de suivi par le CA de la Banque mondiale afin d’évaluer et accompagner le pays dans ses programmes d’aide.

Concrètement, l’institution, qui ne peut pas lancer de nouveaux programmes de soutien avec le pays tant que le CA ne s’est pas réuni, a décidé de suspendre la tenue de cette réunion sur la Tunisie « jusqu’à nouvel ordre », selon le courrier de M. Malpass.

« Les projets financés restent financés et les projets en cours sont maintenus », précise cependant une source proche de la Banque mondiale. La Banque mondiale prévient par ailleurs d’un possible ralentissement de ses actions sur place à cause de la mise en œuvre de mesures de sécurité, en particulier concernant ses employés originaires d’Afrique subsaharienne et leurs familles.

 « La Tunisie a une longue tradition d’ouverture et de tolérance qui est encouragée par tant de personnes dans le pays », a insisté David Malpass dans son courrier. Par ailleurs, le porte-parole du département d’Etat américain, Ned Price, a fait part des préoccupations profondes des Etats-Unis concernant les commentaires du président Saïed.

Il a appelé le gouvernement tunisien à respecter ses obligations au regard du droit international en protégeant les droits de réfugiés, demandeurs d’asile et migrants. Le secrétariat général des Nations unies a de son côté condamné « sans réserve tout commentaire xénophobe et raciste ayant pour but de nourrir la haine raciale », a insisté, également lundi, son porte-parole Stéphane Dujarric.

« Le 21 février, le président tunisien Kais Saïed avait estimé dans un discours que des mesures urgentes étaient nécessaires contre l’immigration clandestine de ressortissants de l’Afrique subsaharienne », parlant notamment de hordes de migrants clandestins «  dont la venue relevait d’une entreprise criminelle ourdie à l’orée de ce siècle pour changer la composition démographique de la Tunisie ».

Selon des chiffres officiels cités par l’ONG Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux, la Tunisie, qui compte quelque 12 millions d’habitants, abrite plus de 21 000 ressortissants de pays d’Afrique subsaharienne, en majeure partie en situation irrégulière. ACP/CL

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