Kinshasa, 05 décembre 2024 (ACP).-La sociologie de la Constitution du 18 février 2006 de la République démocratique du Congo a été débattue dans une conférence-débat mercredi, à l’Université de Kinshasa (Unikin), a-t-on appris jeudi d’un communiqué.
« La sociologie de la Constitution en RDC doit nécessairement se faire dans une perspective connectée, intégrant en particulier la trajectoire et la sociologie de l’Etat en occident. En effet, il est reproché à la Constitution congolaise du 18 février 2006 d’être un produit d’importation, une pâle copie des constitutions occidentales », a déclaré Félicien Kalala Mupingani, professeur à la faculté de Droit à l’Unikin.
« Si les Constitutions modernes sont des produits d’une histoire européenne qui se sont progressivement imposées dans la quasi-totalité du globe, donc en RDC, cette universalisation soulève plusieurs enjeux. D’abord, ces inventions européennes, leur importation en Afrique et au Congo ne signifient pas que l’Afrique et le Congo n’avaient pas inventé leurs propres modèles d’organisation politique et leur propre mode de gestion du pouvoir et des principes qui les sous-tendent », a-t-il ajouté.
Parmi les principaux objectifs poursuivis par la transition régie par la Constitution du 4 avril 2003, a-t-il dit, il y avait non seulement l’organisation d’élections libres et transparentes à tous les niveaux permettant la mise en place d’un régime constitutionnel démocratique, mais aussi la mise en place des structures devant aboutir à un nouvel ordre politique.
Pour lui, la Constitution du 18 février 2006 apparait comme un texte de compromis multiples et cela est visible non seulement dans le processus de sa mise en place, mais aussi dans son contenu et dans ses principales options.
« La rédaction du texte constitutionnel de 2006 s’est certainement inspirée de l’héritage immédiat de l’accord global et inclusif pour garantir la paix et la stabilité indispensables à l’organisation des élections apaisées. Le texte s’est inscrit dans une démarche tendant à assurer un certain équilibre entre les forces politiques en présence », a indiqué Félicien Kalala.
« Aux uns et aux autres, le constituant semble avoir apporté des solutions à travers le compromis du silence destiné à donner à chacune l’impression d’avoir été satisfait. La même attitude de compromis semble avoir prévalu dans la voie médiane suivie par le constituant de 2006 sur la nature du régime politique », a analysé l’intervenant.
Le bien-fondé de la révision constitutionnelle
Par ailleurs, le Pr Kalala a fait savoir que le bien-fondé de la révision de ces dispositions constitutionnelles réside dans la volonté du constituant congolais à tempérer les ardeurs belliqueuses des animateurs des institutions politiques provinciales, dont l’agitation permanente jette le discrédit sur la régionalisation constitutionnelle des provinces et rend celles-ci ingouvernables.
Selon l’intervenant, la stabilité de la Constitution étant un gage de sécurité juridique, sa révision doit être soumise à des conditions très strictes.
« La procédure y attachée part de l’initiative de révision par le Président de la République, le gouvernement après délibération au conseil des ministres, chacune des chambres et une fraction du peuple congolais à son approbation définitive par référendum populaire ou néanmoins les deux chambres du parlement réunies en congrès en passant par le vote du bien-fondé de l’initiative par chacune des chambres », a expliqué le Pr Kalala.
Parlant des clauses verrouillées, il est revenu sur l’article 220 de la Constitution.
« La protection de la démocratie a amené, en outre, le constituant congolais à rendre certaines dispositions, en regard avec des précédents fâcheux de l’héritage politique et constitutionnel congolais, intangibles. C’est l’œuvre des dispositions de l’article 220, appelé par certains chercheurs « verrou constitutionnel », qui écarte toute révision portant sur la forme républicaine de l’État, le principe du suffrage universel, la forme représentative du gouvernement, le nombre et la durée des mandats du Président de la République, l’indépendance du pouvoir judiciaire, le pluralisme politique et syndical ainsi que toute révision ayant pour objet ou pour effet de réduire les droits et libertés de la personne ou de réduire les prérogatives des provinces et des entités territoriales décentralisées », a-t-il expliqué.
Cette conférence-débat avait comme thème : « l’ordre constitutionnel face aux mutations de la société : du populisme au discours académique ». ACP/