Muanda, 13 oct. 2021 (ACP).- L’érection du port en eaux profondes à Banana appelle un véritable débat et des études d’impact efficaces nécessitant des avis techniques et scientifiques de l’organe scientifique de la vice-Primature en charge de l’Environnement et du développement durable.
C’est ce qui ressort des entretiens qu’ont eu les chevaliers de la plume du Réseau des communicateurs pour le développement durable (RCDD) en voyage de presse conduite par Marc Ngwanza de l’Unité de communication du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) dans la ville côtière de Muanda ,du 02 au 09 octobre courant, avec notamment le conservateur du Parc marin de Muanda (PMM), Marcel Collet.
En effet, la dernière maquette de cet ouvrage n’épargnera pas les mangroves, un écosystème qui constitue le rempart contre les marées hautes et les marées basses. Cet écosystème est une frayère des poissons, l’unique forêt qui donne de l’oxygène dans la région où les pluies sont rares et piège le gaz carbonique (CO2).
Les mangroves, on ne le dira jamais assez, est une forêt côtière qui se trouve partout dans le monde, représentant 1 % des forêts tropicales entre les deux tropiques : le Capricorne et le Cancer. Aujourd’hui, la superficie des mangroves est estimée à 180 000 m2.
« En RDC nous avons une petite forêt de 25 hectares sur 250. 000 km2, d’autant plus précieuse, qu’elle est une réserve halieutique de tous les poissons de la côte », a affirmé le conservateur Marcel Collet, révélant que c’est une véritable barrière antiérosive pour le littoral à l’océan.
Elle est également intégrée à l’embouchure et dans les mangroves où se jouent des interactions perpétuelles pour tous les poissons qui y vivent parce qu’ils viennent, soit pour s’accoupler, soit pour y nicher, soit pour intégrer le milieu de la mangrove.
Elles sont aussi une éponge contre la pollution, car, lorsqu’elles la captent, elles finissent par la digérer.
Les mangroves, a-t-il encore souligné, ont un grand attrait touristique au pays. C’est une forêt puissante qui ne peut pas être isolée, dissociée et séparée de la plage, car elle vient compléter l’aspect touristique au niveau de la côte.
Du point de vue d’impact socio- économique, la cité de Muanda et ses environs, avec ses 37 Km de côte accueillera toute la population de Matadi et de Boma ainsi que des personnes qui viendront d’ailleurs. Déjà ,les mangroves sont attaquées pour la fabrication de la braise très prisée par les ménages, qu’en sera- t- il du déversement de tout ce monde à la quête légitime, bien sûr, des emplois et du bien- être, alors que Muanda regorge à peu près 180.000 habitants.
Jouant le rôle de guide, le conservateur Marcel Collet a fait découvrir aux journalistes les circuits longeant les mangroves, les merveilles de la pointe de l’île de Rose située à droite de l’embouchure et de la pointe de Mbula Mbemba. Ce dernier site fut tour à tour un village, un camp militaire, lors de la deuxième guerre mondiale et une prison qui hébergea certains prisonniers politiques célèbres de la RDC notamment l’ancien Premier ministre Antoine Gizenga et Cleophas Kamitatu Massamba.
Alerte sur la disparition des mangroves
En voulant résoudre un problème, on en créera un autre susceptible d’entrainer sur le plan environnemental des situations irréversibles ou des conséquences graves et leur corollaire avec impacts négatifs en termes d’espace de vie et des besoins en énergie bois.
Calqué sur l’étude d’impact d’un pays africain que l’on veut dupliquer pour l’érection du port en eaux profondes, les avis techniques de l’Institut congolais pour la Conservation de la Nature (ICCN) et d’autres services du ministère de tutelle trouveront du sens et sont attendus en vue d’aider les politiques à prendre des décisions éclairées.
Dans l’entre temps, les scientifiques sont formels et alertent : « si les mangroves ne sont plus là, les lamantins, espèce phare, les poissons, les crustacés, et tout ce qui se meuvent dans cet écosystème disparaitront sans aucune autre forme de procès ». Ça sera la fin des endroits mythiques et de la colonie des perroquets appelé lac aux perroquets, des curiosités à découvrir dans les mangroves et à revendre.
L’embouchure du fleuve Congo a une histoire mythique
Parlant de l’embouchure du Fleuve Congo, le conservateur du Parc marin de Muanda (PMM), Marcel Collet, a fait savoir que son histoire est mythique, qu’on ne peut changer, ni falsifier, car, elle vaut pour tous les peuples du monde, étant donné que tous les peuples de la terre ont une histoire propre à eux.
L’ouverture de l’Afrique à l’Occident, a rappelé Marcel Collet, est survenue à la fin du 19ème siècle entre 1885 et 1908, car c’était la période où la Belgique a créé l’Etat indépendant du Congo et colonisé les peuples qu’il a trouvé dans cette partie du Bassin du Congo.
Cependant, la découverte de la côte africaine fait suite à la prise de Constantinople en 1453 et au commerce qui se pratiquait en Europe à partir du 10èmesiècle avec l’Asie pour des échanges perpétuels de biens entre les villes de Lisbonne, de Londres, de Venise et d’Amsterdam qui s’enrichissent dans cette activité lucrative.
Les Ottomanes, quant à eux, ont conquis l’Europe en 1453 notamment l’empire romain d’Orient et imposé les textes des Romains et des routes terrestres pour s’approvisionner en biens d’Orient qui étaient très prisés (poivres et autres épices), tandis qu’une poignée d’Européens avaient commencé à longer la côte africaine, après que des navigateurs aient institué à Venise, la première société d’action qui va acheter des bateaux. C’est bien Venise qui va inventer les premières sociétés d’actionnaires et ses navires qui ont commencé à descendre le long de la côte et c’est cette ville italienne qui était en contact avec le Nord de l’Afrique à partir de Carthage (Tunis) avec espoir de voir la route s’ouvrir.
Entre temps ,Christophe Colombe, a- t-il ajouté, eut une idée de faire le tour du monde en allant à l’ouest qui, dix ans après, va faire découvrir à l’Europe l’Amérique et prendre connaissance des Amérindiens qu’il appela les Indiens. Il était le lien entre l’Europe et l’Amérique.
C’est 30 ans après, en 1482, que Diego Cao débarque à l’embouchure du fleuve Congo, jouant ainsi la partition de l’histoire de l’Afrique, en général et de la RDC, en particulier. Diego Cao en descendant arriva dix ans après au Cap de bonne espérance et va pouvoir bifurquer et découvrir Madagascar, des européens et des autochtones développant un commerce et des échanges qui ont permis à celui-ci de déverser les biens de l’Amérique en Afrique.
Du coup, suite à l’apport venu de l’Orient et de l’Amérique, les régimes alimentaires de certains Africains avaient changé car remplacé par le maïs, la tomate, le manioc venu du Brésil, la pomme de terre du Pérou, l’ananas, la mangue du Mexique, les avocats.
Les consommateurs vont bénéficier de tous ces nouveaux produits dont les cultures sont récentes en Afrique centrale aussi bien en Europe et qu’Afrique.
Le commerce d’esclaves
Abordant la question relative au commerce d’esclaves, il indiquera que c’est à peu près, après 1 siècle que va s’installer en 1510, le commerce d’esclaves, entre l’Amérique et l’Angola. Quant aux Européens, ils vont venir chercher des marchands, sachant que l’esclavage a été aboli, mais la demande des esclaves va se poursuivre tout au long du Golfe de Guinée jusqu’au Sénégal et en Angola.
Pendant cette période, l’esclavage battait son plein depuis mille ans favorisé par les Arabes du Nord et l’Arabie, en passant par Zanzibar où cette pratique a continué bien après son abolition en Amérique, puisque la dernière bataille avec les esclavagistes au niveau de Kisangani a eu lieu vers 1903 avec Tipo Tipo.
Toutefois, les Européens ne vont pas s’immiscer dans cette affaire pendant 5 siècles parce qu’une barrière sanitaire les en empêchait. N’étant pas capables de résister aux maladies tropicales, ils vont rester près des côtes et vont s’illustrer dans quelques incursions vers Boma et Matadi, avant de tenter leur aventure vers l’Afrique du sud où il va s’installer le premier comptoir à Cap Town au sud et en Angola où ils sont moins exposés à des maladies et se décident de s’installer.
C’est dans ces conditions, à la fin du 19 siècle, qu’ils vont arriver ici avec Morton Stanley dont sa descente du fleuve Congo va faire découvrir aux occidentaux ce majestueux fleuve qui tout au long était peuplé des habitants. Dans son journal de voyage, il a dénombré 806 000 habitants.