Dans un meeting populaire le mardi 26 novembre dernier à la Place Mandeleo à Kalemie dans la province du Tanganyika, le Président de la République Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo, a réitéré pour la troisième fois en moins d’un mois, sa volonté d’apporter des changements à la Constitution actuelle, après ses premières interventions respectives à Kisangani dans la Tshopo, et à Lubumbashi dans le Haut-Katanga.
» Ce que j’ai dit à Lubumbashi en ce qui concerne la Constitution, je n’ai rien à changer. Mon message reste le même, et vous, vous êtes un peuple plein d’initiatives, qui avez combattu la dictature la plus atroce. Vous devez aussi prendre l’initiative pour ce qui est de cette constitution, qui ne vise pas l’intérêt de la nation« , a déclaré le Chef de l’Etat congolais.
La question du changement, de la modification ou non de la Loi fondamentale actuelle, qui date de 2006, est au centre des conversations et des querelles dans le landernau politique congolais, entre les pro-révisions, les pro- changement, et les anti- deux premières thèses, ces derniers se recrutant pour la plupart dans les rangs de l’opposition au régime en place.
Dans le tintamarre médiatique qui prévaut actuellement sur ce sujet, peu de commentateurs se rappellent que cette question de révision-modification de la Loi fondamentale, date de la nuit des temps, et qu’à chaque fois qu’elle est mise sur la table par un acteur politique ou de la société civile, son auteur devient la cible des boules puantes venues de tous les horizons de l’écosystème politique locale.
Une querelle vielle comme le temps
Peu après les premières élections démocratiques de 2006, un éminent acteur politique de la Majorité présidentielle de l’époque, Olivier Kamitatu Etsou, alors à la tête d’un parti politique dénommé ARC, se mit en tête de proposer une ré-écriture de la Constitution actuelle, préconisant entre autres, le passage à un régime présidentiel, l’élection du Président de la République au second dégré, et la suppression du poste de Premier ministre. Mal lui en prit. La salive de ses premières déclarations ne s’était pas encore séchée, l’auteur était pris en sandwich, traité de tous les noms d’oiseaux volants, et son initiative jetée aux feux de l’enfer. Aujourd’hui installé durablement dans l’opposition, il s’affiche comme la Jeanne-d’Arc de la défense de la même constitution.
Dans l’année 2011, le Chef de file de l’opposition de l’époque, feu Etienne Tshisekedi wa Mulumba, répondant à la question d’un journaliste, y alla aussi de son pavé dans la marre. Un nommé Kalonga Ali, alors journaliste au média en ligne « Culture congolaise. Com. , demanda au Sphinx comme l’appelaient ses partisans, de lui répondre, « les yeux dans les yeux », si un nouveau Congo était encore possible.
La réponse d’Etienne Tshisekedi fût la suivante: « Mais c’est évident. Je vous ai dit que depuis l’indépendance, nous vivons dans une jungle …, l’exemple, la jungle actuelle est régie par une soit disante constitution, qui est taillée sur mesure, sur la mesure des belligérants. Dès notre élection, c’est terminé. Cette constitution(celle de 2011), c’est un chiffon que nous allons jeter à la poubelle, et nous reviendrons à une constitution élaborée par les Congolais et pour les Congolais, celle élaborée par la Conférence Nationale Souveraine. Dans quelques jours, dans quelques mois, on va organiser un référendum pour que le peuple congolais adopte pour la première fois depuis l’indépendance, sa véritable constitution… »
Ironie de l’histoire, le journaliste auteur de l’interview, s’avérait être un proche parent de feu Etienne Tshisekedi, et actuel Président du Conseil d’Administration de l’Agence congolaise de Presse, après y avoir presté successivement comme journaliste, Rédacteur en Chef, Président-Directeur Géneral de l’ACP, et actuel Président du Conseil d’Administration de la même Agence. Mais cela est une autre histoire.
Peu avant les élections de 2018, un autre leader politique, Denis Sessanga Djakasiw, candidat à la Présidence de la République, engagea une croisade sur le même thème. Cette nouvelle initiative fût également sans lendemain, et comme de coutume, son auteur fût l’objet d’un tir groupé contre sa personne.
Un éternel recommencement
Souvent évoquée, mais sans jamais trouver un début de matérialisation, la question de la modification de la constitution en RDC, est toujours restée pendante depuis 2006.
Des acteurs politiques et de la société civile en dénoncent régulièrement certaines imperfections, et appelent à sa révision ou à son changement, mais font souvent face à un feu nourri de contestations, souvent d’ailleurs, en avançant des arguments loin de tenir la route.
Mais à chaque tentative dans ce sens, les téméraires tombent sous le coup des fatwas de certains de leurs collègues de la classe politique, qui souvent, justifient leur opposition, soit par l’inopportunité, soit par le mauvais timing. La classe politique congolaise est ainsi faite: elle s’oppose à tout, sauf à rien, surtout venant de l’autre camp, et remporte toujours la palme d’or, dans l’art de ne pas savoir se mettre d’accord. ACP/