Trois questions à Jonas Tshiombela, activiste des Droits humains

Kinshasa,  19 mars 2024 (ACP).- Le gouvernement de la République démocratique du Congo a récemment décidé de lever le moratoire sur la peine de mort, dans le but d’éradiquer la trahison et le banditisme urbain.

S’exprimant à ce sujet lors d’un entretien mardi avec l’ACP, Jonas Tshiombela, coordonnateur national de la Nouvelle société civile du Congo (NSCC) a notamment recommandé au gouvernement congolais d’opérer un nettoyage minutieux des mauvais éléments au sein de l’armée nationale, porteurs des agendas de l’ennemi de la République.

Il a également encouragé l’Exécutif national à approfondir les études et dégager des solutions autour des causes profondes de ces phénomènes  et autres similaires.

Question 1 : Comment votre organisation a-t-elle reçu la nouvelle de la levée du moratoire de la peine de mort par le Gouvernement ?

Jonas Tshiombela : Sans entrer dans le débat doctrinal entre rétentionistes et abolitionnistes, nous avons reçu ce message au niveau de la Société civile avec inquiétude. Et dans le souci de chercher la solution, nous avons l’impression que le gouvernement compte attaquer les conséquences, alors que les causes qui les génèrent, notamment dans la lutte contre le banditisme, doivent aussi être prises en compte.

A notre sens, le gouvernement devrait aussi s’attaquer aux causes, en plus des conséquences. Les phénomènes dont il est question doivent être attaqués dans leurs deux aspects, ceux des causes et des conséquences en même temps. C’est grâce à cela que nous aurons une meilleure solution aux problèmes.

Question 2 : Qu’est-ce vous recommandez pour une meilleure application de cette mesure, pour les personnes accusées de trahison, mais aussi pour les bandits urbains dits « Kuluna » ?

Jonas Tshiombela : Comme dit précédemment, le gouvernement devra poursuivre des réflexions sur les causes profondes des trahisons à répétions dans notre armée qui a été piégée depuis des années au moyen des brassages organisés sous la pression de la Communauté internationale. Cela a fait que le dispositif sécuritaire de l’armée soit piégé et que cette dernière ne puisse travailler efficacement. Rappelons-nous des cas révélés récemment, où on a pu mettre la main sur un conseiller du gouverneur qui est de mèche avec l’ennemi. Comment peut-on arriver jusqu’à ce niveau de trahison ?

Nous insistons donc sur le fait que le gouvernement doit opérer un nettoyage minutieux dans l’armée pour voir parmi les forces qui sont entrées durant une certaine période, si elles ne sont pas porteuses des agendas des adversaires de la République. Non seulement que le moratoire de la peine de mort est levé, mais les causes restent aussi un souci majeur.

Concernant le banditisme urbain, il y a aussi beaucoup de causes à étudier. Le problème de la redistribution des richesses nationales et les frustrations de tout genre, tout cela mis ensemble, fait que certaines couches qui se sentent laissées pour compte puissent se lever pour se faire justice.

Et cela peut aider pour que les jeunes désœuvrés ou sans emploi, trouvent une occupation et qu’on avance.

Question 3 : Et pour que cette mesure ne soit pas utilisée comme moyen de règlement des comptes, quelles pistes de solutions suggérez-vous ?

Jonas Tshiombela : Beaucoup parlent de règlement des comptes, mais ils oublient que la Justice de notre pays, est « malade », piégée par la corruption, le trafic d’influence, l’instrumentation politique, etc. La justice de notre pays n’inspire pas confiance. Alors, pour une pareille mesure et en pareil contexte en République démocratique du Congo, je pense que l’application de cette mesure devrait se faire avec un œil regardant, et le traitement des dossiers sans précipitation, de peur que des innocents ne soient exécutés, à l’avantage des auteurs.

Ce que je peux conseiller au gouvernement à ce sujet, c’est de repenser la Justice de notre pays et de l’adapter au contexte, sinon nous risquons de nous retrouver devant plusieurs cas d’irrégularités. Quand bien même le ministère public aurait à exécuter des décisions au nom du Chef de l’État, il faudrait beaucoup de sérieux. Je crois que c’est tout un chemin à faire pour que le travail de la justice soit bien fait. De la sorte on sanctionnera les vrais auteurs, quel que soit leur rang social.ACP/

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