Goma, 17 septembre 2024 (ACP). – Un jeune artisan, cordonnier de son état, s’est lancé dans une initiative innovante en fabriquant de sandales durables à partir des peaux de vache et de vieux pneus à Goma, dans l’Est de la République démocratique du Congo, a constaté lundi l’ACP.
« (…) Les sandales et souliers que je fabrique ici ne sont pas seulement un exemple de créativité et d’innovation, mais ils contribuent également à la réduction des déchets. (…) Les vieux pneus laissés à l’abandon sont utilisés pour allumer le feu sur nos routes goudronnées lors des manifestations citoyennes. Ces vieux pneus trouvent ici une seconde vie. Je les utilise comme semelles pour fabriquer des sandales et souliers, au moins, c’est une bonne cause », a expliqué fièrement, M. Kasereka Muhima Innocent, artisan cordonnier en ville de Goma trouvé en commune de Karisimbi.
Et de précisé : « je suis cordonnier, et je valorise la peau de la vache pour fabriquer des sandales et des souliers. Il y a peu d’articles importés dans la réalisation de ces produits, tout est presque local« , a-t-il déclaré dans un contexte où les produits importés envahissent les marchés de la ville de Goma en particulier et la province du Nord-Kivu en général.
Pour le cordonnier Kasereka Muhima, cette initiative vient rappeler l’importance de valoriser les richesses locales, la promotion de l’économie circulaire locale y compris l’impact de celle-ci sur l’environnement tout en offrant des alternatives avantageuses aux consommateurs.
S’agissant de la dynamique de valorisation de l’autonomie économique, Kasereka Innocent a, à travers cette initiative prouvé qu’il s’agit d’une voie suffisante de l’autonomisation.
« J’ai vraiment une autonomie économique car les besoins des matières premières me servent à la fabrication de ces sandales, je les trouve ici localement, point n’est besoin que je puisse voyager en Ouganda ou en chine. Je trouve presque tous ici localement« , a-t-il affirmé, tout en reconnaissant que » dans un marché de plus en plus dominé par les produits importés de la Chine, de Doubai voire dans les petits pays limitrophes, je pense, qu’il est possible de créer des articles de qualité ici chez nous tout en favorisant le développement local« .
Cet artisan visionnaire a appelé ainsi tous les jeunes à une prise de conscience collective sur l’importance de soutenir les initiatives locales et de valoriser les richesses du terroir.
Il a condamné les jeunes et les adultes qui passent leur temps à critiquer la politique du gouvernement en matière de lutte contre le chômage, pourtant, a-t-il estimé, « il est difficile pour le gouvernement de donner un emploi à chacun dans des bureaux climatisés« .
“Je crois qu’il y a un problème de mentalité, car avec les potentialités dont dispose notre ville, il y a beaucoup à faire, même sans compter sur les emplois fournis par le gouvernement. Par exemple, moi qui ai fait des études, j’ai choisi un métier encore peu exploité, et je vous assure que ce métier est rentable, contrairement à ce que vous pourriez penser. J’ai laissé tous les efforts derrière moi pour me lancer dans ce métier méprisé, mais qui paie bien”.
L’initiative innovante de la transformation de la peau de vache et de vieux pneus en sandales durables est, néanmoins confrontée à de nombreux défis dans la ville de Goma.
C’est entre autre la multiplicité des taxes et impôts, la médisance de certaines personnes face à la pratique du métier de cordonnerie, et la difficulté d’accéder à certaines zones sous contrôle des rebelles du M23-AFC, entraînant ainsi une baisse du nombre de clients.
« Suite à la coupure de la route Goma-Rutshuru-Butembo et Beni, nous ne recevons plus les clients en provenance de l’ex-province orientale », s’est plaint Innocent Kasereka sans perdre espoir pour un lendemain meilleur.
Les sandales ainsi fabriquées en base de la peau de la vache et les vieux pneus en ville de Goma, rencontrent un succès croissant auprès de la population locale, sensible à la qualité et à la durabilité des produits, mais aussi à l’idée de soutenir un artisanat qui valorise les richesses locales.
Cette initiative invite à une réflexion sur l’importance de soutenir les productions locales et de repenser notre rapport à la consommation, en privilégiant des articles qui joignent le savoir-faire, la qualité et surtout le respect de l’environnement. ACP/C.L.