Kinshasa, 22 septembre 2024 (ACP).- 39 ans déjà dans l’au-delà, les mélomanes de deux rives du fleuve Congo et du monde se souviennent d’un maître de la guitare hors pairs et riche en innovations artistiques, en la personne de Nicolas Kasanda wa Mikalayi, alias « Docteur Nico ». Nicolas Kasanda wa Mikalay “Dr Nico”, reste le plus grand guitariste solo de l’histoire de la musique congolaise moderne, mieux que son cousin germain Emmanuel Tshilumba wa Baloji « Tino Baroza », son maître spirituel, lequel avec Charles Mwamba « Dechaud » son frère ainé et guitariste accompagnateur. Ils ont été formés par le guitariste “hawaïen” Zacharie Elenga « Jimmy ».
« Depuis sa disparition, à l’âge de 46 ans, la légende de Nico Kasanda n’a cessé de grandir. Un Comité de gestion de ces œuvres qui a vu le jour en 2015 sous la présidence d’Ignace Mukendi Mbambi a été ouvert à tous les sympathisants et il constitue le point de ralliement de ceux qui continuent de célébrer sa musique et son charisme », a indiqué Clément Ossinonde, ancien président de l’Union nationale des écrivains et artistes du Congo (Uneac) sur l’une de ses pages sociales consultée par l’ACP.
Parlant particulièrement de son héritage, Clément Ossinonde a révélé que depuis septembre 2018, avec le concours du label musical ‘’Planet Ilunga’’, une œuvre musicale d’anthologie se trouve dans les bacs en Europe et en Afrique. Cette œuvre porte le titre : « Docteur Nico, dieu de la guitare”.
« C’est une compilation de 26 titres repartis en deux albums vinyles 33 tours qui retracent la vie et la carrière musicale de Docteur Nico. Des chansons rares et des chefs-d’œuvre signés de sa main », a signifié Clément Ossinonde.
« Dans son style, Nico Kasanda, rechercherait les effets techniques en soignant également les courbes mélodiques et la vivacité rythmique. Il est également cithariste (à l’hawaïenne) d’une virtuosité époustouflante. Il est la star de cette musique sensuelle et raffinée qui fonde depuis des années », a soutenu Clément Ossinonde.
Nicolas Kasanda, « Nico Mobali », l’enfant prodige de l’African-Jazz
François Boyimbi alias Gobi, Tshilumba wa Balozi dit Tino Baroza, Charles Mwamba Déchaud, Henri Bowané, Albert Luampasi, Paul Ebengo Dewayon, étaient les guitaristes émérites qui accompagnent chanteurs, chanteuses et groupes dans les studios d’enregistrement de Léopoldville(Kinshasa), notamment aux éditions Opika où règnait en maître absolu un certain Élenga Zacharie dit Jhimmy L’hawaïenne, tête de gondole de celles-ci vers la fin des années 40 et début 50.
Devant ces virtuoses, Audifax Bemba, figure emblématique du mouvement de la Word Music, a affirmé pour sa part « qu’en 1953, la pré-adolescence à peine entamée, Nicolas Kasanda est âgé de 14 ans lorsque Joseph Kabaselé lui confie les clefs de la guitare solo du premier orchestre congolais de variétés moderne qu’il venait de créer, l’orchestre African-Jazz. Parmi les premières chansons enregistrées par le jeune guitariste figure ‘‘Para Fifi’’, œuvre de l’illustre créateur, qui a conquis avec le temps le statut de standard de la plus belle chanson d’amour de la musique congolaise ».
Dans ce chef-d’œuvre, Nico Kasanda signe une guitare pleine d’audace et d’innovations, deux mamelles qui nourriront sa carrière de soliste.
Dans chef-d’œuvre, Kallé Jeff plonge à pieds joints dans un refrain où le solo de guitare en trois phases démarre sur des chapeaux de roue. Nico décoche un trémolo pour entamer son sujet, puis enchaîne un agitato autant osé qu’inattendu pour attaquer la deuxième phase, cette pierre d’achoppement aux guitaristes qui l’interprètent.
Nico Kasanda a inauguré son époque, en avance sur son temps, les enregistrements de l’African-Jazz ont porté le cachet de l’innovation, à commencer par la guitare.
Guitariste inimitable
Kabasele a porté son dévolu sur Docteur Nico au milieu de moult guitaristes chevronnés, justement pour révolutionner, et apporter la modernité. À juste titre, son mentor a déjà ajouté au diminutif de son prénom l’additif « mobali »: Nico mobali, signifiant que Nico est désormais le cador, le taulier dans sa catégorie.
C’était une ère nouvelle qui s’était ouvert désormais pour la guitare dans la musique congolaise. À la surprise du public, les guitaristes congolais peinent encore à en saisir la technique. Il leur faudra plus d’une année pour comprendre les contours de cette dextérité.
Au début des années 60, Dr Nico a été l’un des acteurs clé qui a établi une place prépondérante pour la guitare électrique dans la musique populaire du continent pendant son âge d’or dans son évolution en tant qu’instrument de musique.
Il a joué un rôle majeur dans la création du style unique à trois guitares entendu dans la rumba congolaise et les genres y associer tels que le soukous. En fait, le Dr. Nico a été l’un des deux grands guitaristes congolais. Son plus grand rival a été Franco Luambo Makiadi, leader du groupe TP OK Jazz. Il avait également accompli de belles choses au cours de sa carrière. Tous les deux ont été des artistes innovants et très passionnés.
En 1960, la République démocratique du Congo s’est libérée de la domination coloniale belge. Dr Nico a aidé à forger la bande originale de cette soirée devant plusieurs hôtes en jouant à la guitare sur le single emblématique ‘‘Indépendance Cha Cha’’. Il s’est retiré de la scène musicale vers le milieu des années 1970 à la suite de la faillite de son label musical belge, avant de mourir le 22 septembre 1985 à 46 ans, à l’hôpital Saint-Luc, en Belgique. ACP/