La CPI à l’épreuve des crimes imprescriptibles multiformes commis en RDC (Par Mathieu Yoha)

Kinshasa, 30 mai 2023 (ACP).- Le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), le Britannique Karim Khan, séjourne en République démocratique du Congo, à la tête d’une forte délégation de cette haute juridiction internationale, depuis dimanche 28 jusqu’au jeudi 31 mai.

Le procureur de la CPI  se rendra, lors de cette visite, dans la partie orientale de la RDC, notamment à Bukavu, Goma, Beni et en Ituri, « théâtre des conflits et crimes impunis depuis des décennies  » où «  Karim Khan pourra se rendre compte du désastre humain que vit la population », a-ton appris de source onusienne. La RDC avait invité, à l’occasion de la 21ème session de l’Assemblée des États parties au Statut de Rome, tenue au siège de la CPI du 5 au 10 décembre 2022, la CPI à « enquêter sur le désastre humain causé par les groupes armés dans l’est de son territoire national». Le gouvernement de Kinshasa ciblait en particulier les terroristes ougandais des ADF ainsi que ceux du M 23, supplétifs des Forces de défense rwandaises (RDF-armée gouvernementale). Pour que tout se déroule, selon les normes, la RDC a déposé plainte, le mardi 23 mai, à la CPI, à La Haye aux Pays-Bas, contre la coalition armée rwandaise-M23 pour les crimes commis dans l’Est du pays. «La RDC est profondément préoccupée par les graves violations du droit international humanitaire et des droits de l’homme commises, et qui se perpétuent, contre les populations civiles, ainsi que les pillages systématiques et à grande échelle de ses ressources naturelles par les agents de la coalition RDF-M23 (Rwanda Defense Forces et Mouvement du 23 mars), principalement dans la partie Est de son territoire », a déclaré la ministre d’Etat en charge de la Justice et garde des sceaux, Rose Mutombo, lors du dépôt de cette plainte au bureau du procureur de la Cour pénale internationale, et réceptionnée par le procureur adjoint Mame Mandiaye Niang.

Elle a, à cet effet, invité le procureur à y focaliser son attention et à initier le processus d’enquête aux fins des poursuites et de répression des agents de la coalition RDF-M23 ainsi que de toute autre personne impliquée, à titre d’auteur ou de complice, dans les actes et comportements illicites caractérisés par de graves violations du Droit international humanitaire (DIH) et du Droit international des droits de l’homme (DIDH) enregistrés entre 2022 et 2023.

Lutte contre l’impunité La République démocratique du Congo (RDC), a fait savoir la ministre d’Etat Rose Mutombo, inscrit cette plainte dans la dynamique de la cause de l’humanité pour lutter contre l’impunité desdits crimes, en recourant aux moyens civilisés, notamment par sa pleine et entière collaboration avec la Cour pénale internationale. L’arrivée du procureur Karim Khan de la CPI en RDC peut d’ores et déjà être considérée comme une première étape visant la restauration de la justice dans l’Est de ce pays où, depuis une vingtaine d’années, s’y commettent les pires horreurs connues par l’humanité depuis la fin de la Deuxième guerre mondiale.

Les auteurs et les commanditaires des crimes contre l’humanité et des violences indicibles dans la partie orientale de la RDC sont aujourd’hui bien connus et identifiés, sur base des rapports pertinents dont ceux des experts des Nations Unies. Ils ne s’en cachent d’ailleurs plus, lorsqu’ils tentent malencontreusement de justifier la présence des corps expéditionnaires étrangers, notamment rwandais, massacrant des populations civiles et contraignant d’autres à un déplacement forcé, au fallacieux motif d’y combattre des rebelles hutu (les fantomatiques Forces démocratiques de libération du Rwanda-FDLR, opposition armée) qui menaceraient leur pays à partir du sol congolais. Un argumentaire qui ne convainc plus personne, tout le monde aujourd’hui (ONU, Union européenne, Union africaine, organisations internationales de défense des droits de l’homme et autres observateurs de bonne foi) s’étant rendu compte que l’interventionnisme militaire direct ou par l’entremise des « rébellions  » de certains voisins de la RDC à l’Est de ce pays ne visait qu’à concrétiser un certain projet chimérique d’hégémonisme atavique et à faire main basse sur les fabuleuses richesses minières dont cette contrée est pourvue. Au point que certains de ces pays agresseurs de la RDC sont devenus des exportateurs nets des minerais, notamment l’or et le coltan, dont aucun filon ne se trouve sur leurs sols.

Le régime mono-ethnique de Kigali Contre toute attente et au mépris du bon sens le plus élémentaire, les commanditaires de l’agression contre la RDC et leurs suppôts locaux continuent à afficher une attitude impénitente et suicidaire de défi en se montrant hostiles à toute initiative visant la paix et le respect des droits de l’homme à l’Est en RDC. Ni la clameur publique internationale, notamment les rapports des experts de l’ONU et les déclarations de l’Union européenne appelant au retrait des troupes d’agression, ni les initiatives répétées dans ce sens des Etats de la région, encore moins les preuves irréfutables de leur implication avérée dans les crimes de guerre et autres crimes contre l’humanité, notamment celles que vient de leur asséner un des grands spécialistes des questions de la région des Grands lacs, l’écrivain camerounais Charles Onana dans son dernier ouvrage intitulé  «  Holocauste au Congo. L’omerta de la communauté internationale  », rien ne vient perturber leur arrogance. Difficile donc aujourd’hui pour les analystes de comprendre jusqu’où veut aller le régime mono-ethnique de Kigali dans son aventurisme militaire d’avance vouée à l’échec à l’Est du Congo. Alors qu’en RDC la population ne compte plus que sur l’état de siège décrété dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri pour mettre fin, de gré ou de force, aux violences aveugles qui ont fait, au bas mot, dix millions des victimes, selon des chiffres concordants, l’arrivée du procureur de la CPI dans ce pays est perçue comme une opportunité historique de mettre hors d’état de nuire, une fois pour toutes, les commanditaires et auteurs des massacres à l’Est.

Par le passé, la CPI n’avait eu qu’à juger quelques fauteurs des troubles à l’Est de la RDC, laissant de côté les véritables commanditaires et auteurs patentés des massacres. Pas étonnant donc que les violations des droits de l’homme ont continué en s’amplifiant. En dépit de l’attitude inexplicable du pays d’origine du procureur de la CPI, qui s’est lancé dans un projet loufoque de peuplement du Rwanda avec des demandeurs d’asile reçus en Grande Bretagne, pour bon nombre des Congolais et d’Africains, la CPI joue, cette fois-ci, sa crédibilité en RDC et en Afrique. ACP/

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