La journée mondiale de lutte contre le diabète est commémorée le 14 novembre de chaque année. Le thème retenu pour cette journée en 2024 est « Le diabète et le bien-être ». L’ACP a, à cette occasion, abordé le Dr Peter Kayibabu, médecin affecté au service de diabétologie de l’hôpital de l’amitié sino-congolaise situé dans la commune de Ndjili, dans la partie Est de la ville de Kinshasa. Il a expliqué cette maladie et sa prise en charge.
Q. 1: Qu’est-ce que le diabète et quelles sont les causes de cette maladie.
Peter Kayibabu : « Le diabète est une pathologie métabolique caractérisée par une hyperglycémie, résultant d’un problème d’action de l’insuline, ou de sécrétion d’insuline, ou parfois des deux à la fois ».
« Il y a des signes qui le caractérisent: Une hyperglycémie, c.à.d. l’examen biologique et une glycémie avant le repas et après le repas.
A cela s’ajoute une glycémie postprandiale, c’est-à-dire une glycémie deux heures après un repas, supérieure ou égale à deux cents milligrammes par décilitre, associée aux signes cliniques du diabète tels que la polyurie (urines abondantes), la polydipsie (soif intense), l’amaigrissement. Avec ces signes, on peut déjà penser au diabète ».
« Malheureusement, plusieurs patients consultent en retard, parfois lorsque la pathologie a déjà entraîné des complications ».
« En effet, vous savez bien qu’actuellement, en raison des traditions ou par manque d’informations, beaucoup n’ont pas l’habitude de faire un check-up, ne serait-ce qu’un dépistage, pour surveiller l’évolution de leur glycémie. Par conséquent, certains consultent à cause de complications comme un coma diabétique, ou parce qu’ils présentent des plaies qui ne cicatrisent pas depuis longtemps. D’autres viennent parce qu’ils perdent du poids malgré une bonne alimentation, ce qui révèle souvent une hyperglycémie ».
« Il est vrai que lorsqu’une pathologie est bien suivie, on peut éviter les complications fâcheuses, qui affectent tout le corps, de la tête aux pieds. Le bon suivi de l’hyperglycémie, au jour le jour, chaque semaine, chaque mois, chaque année, permet à la personne diabétique d’être à l’abri de ces complications ».
« Nous, les professionnels de la santé, ne nous contentons pas uniquement de la glycémie à jeun que le patient nous rapporte. Nous réalisons également une moyenne des glycémies du patient au moyen d’un examen appelé hémoglobine glyquée, souvent surnommée la « boîte noire » du patient diabétique, car elle donne la moyenne glycémique des trois derniers mois. Si nous avons une hémoglobine glyquée inférieure ou égale à 7 %, nous pouvons alors considérer que tout est sous contrôle ».
« Lorsque l’organisme montre des signes de défaillance dans la gestion du glucose, il faut lui apporter un soutien. Il est vrai que certaines personnes naissent avec des prédispositions au diabète. L’obésité et la résistance à l’insuline, par exemple, peuvent favoriser l’apparition du diabète. Mais un bon suivi permet de maintenir des glycémies normales, et par conséquent, de se protéger contre toutes les complications fâcheuses associées à cette hyperglycémie ».
Q. 2: Comment soigne-t-on le diabète ?
P. K : « La gestion du diabète passe par plusieurs choses, notamment le socle, la base, c.à.d. l’éducation diabétique. Le diabétologue a le devoir d’aider le patient diabétique à comprendre ce qu’est le diabète ».
« Car si le patient comprend ce qu’est le diabète en amont, en aval il prendra conscience sur les mesures à prendre pour s’en sortir, car plus d’une personne dit : « J’ai pris tout ça et jusqu’à quand vais-je continuer à prendre ces médicaments ? » C’est là le problème.
Raison pour laquelle Il faut expliquer le diabète au patient de manière plus détaillée afin de mieux assurer son éducation diabétique ».
« Nous (diabétologues) allons alors instaurer un traitement: premièrement, ce sont les mesures non médicamenteuses. Donc, l’un des « médicaments » de base est de revoir le mode de vie. Changement de mode de vie : on ne devrait plus manger comme auparavant. Cela signifie qu’on doit s’assurer de manger des aliments sans sucre, et éviter les boissons sucrées, la canne à sucre, le miel. Il y a des aliments très riches en sucre, comme l’ananas, que nous devons consommer avec modération. Il est vrai qu’il y a aussi certains aliments importants, mais il faut limiter, par exemple, les pommes, les pastèques, etc. Il y a toutefois des aliments que l’on peut manger ».
« Les mesures non médicamenteuses incluent également la consommation d’une bonne alimentation telle que ; la farine de maïs, de semoule, de légumes sans exception, toutes sortes les légumes sont conseillés. Il faut aussi faire un peu d’activité physique régulièrement, évité de grignoter et de manger après 20 heures. Ce sont également des mesures non médicamenteuses ».
Ensuite, nous passons aux mesures médicamenteuses, où le traitement est maintenant dirigé en fonction du type de diabète. On peut administrer des comprimés éventuellement.
Q. 3: Quelle est la prévalence ou l’ampleur du diabète à Kinshasa en particulier et en RDC en général ?
P. K : « Jusque-là, à travers toute la République, nous n’avons pas d’études qui donnent une prévalence précise. Il n’y a pas de prévalence exacte, mais des études réalisées parlent d’une prévalence d’environ une personne sur cent qui serait diabétique à Kinshasa ».
« Il est vrai que la prévalence, sur la base des données, augmente chaque jour. Nous pouvons agir localement, comme avec une campagne de dépistage réalisée dans certains quartiers. Cela fait pratiquement une année depuis la dernière campagne, mais nous en organisons presque chaque année depuis au moins cinq ans, depuis 2019. Ces campagnes durent parfois cinq jours et coïncident souvent avec la Journée mondiale du diabète ».
ACP/C.L.