Kinshasa, 24 juin 2024 (ACP).- Un appel à briser le silence et la peur face aux injustices a été lancé lundi aux veuves de la République démocratique du Congo, lors d’une conférence-débat à Kinshasa, à l’occasion de la Journée mondiale des veuves, célébrée le 23 juin de chaque année.
« Nous avons tenu cette conférence pour expliquer aux femmes, précisément les veuves leurs droits et rôle dans la famille et dans la société toute entière. Elles sont appelées à briser le silence et à ôter la peur face aux injustices et stigmatisations dont elles sont victimes», Mme Prisca Menayame, présidente de l’Ong « Femme et société« .
Et d’ajouter : «nous avons tenu à sensibiliser et à informer les femmes afin de les aider à se prendre en charge et à défendre leurs droits lors de la perte du conjoint, mais aussi, à refuser tout traitement inhumain qu’on leur inflige ».
Selon Mme Menayame, cette activité s’inscrit dans le cadre d’une prise de conscience collective, car de nombreuses veuves cèdent par peur de la tradition. Ce qui les amène souvent à quitter leur domicile conjugal et à se laisser à la portée des sévices physiques et morales, des tortures diverses, etc.
« Des rites avilissants et dégradants imposés aux veuves doivent cesser et leurs auteurs doivent être punis par la loi », a-t-elle déclaré.
Mme Menayame a exhorté les veuves à saisir les services compétents (police, gendarmerie, parquet et tribunal) en cas de maltraitance quelconque, car les mauvais traitements doivent être réprimés par les lois en vigueur dans le pays et doivent exposer ainsi leurs auteurs à des poursuites de tout genre.
«Il doit exister un cadre juridique pour que les femmes ne soient pas privées de leurs droits, mais le véritable ennemi de la femme congolaise, c’est la coutume. Alors, il faut que les choses changent et que les femmes apprennent aussi à parler avec leurs époux de certains sujets pendant qu’ils sont encore vivants », a-t-elle poursuivi.
Explication des concepts veuve et veuvage selon le code de la famille
M. François Kabeya, conseiller à l’Ong « Femme et société » a, pour sa part, expliqué aux femmes les concepts « veuve et veuvage » tel que défini dans le code congolais de la famille.
«Le Code congolais de la famille stipule : A la perte de son conjoint, la femme mariée devant l’officier de l’état-civil est veuve et jouit de tout avantage lié à la succession comme le prévoit la loi », a-t-il fait savoir, avant de préciser : « le veuvage ne doit aucunement être considéré par les veuves comme une maladie pour se laisser morfondre dans l’amorphisme. Au contraire, les veuves doivent continuer à vivre et à vaquer librement à leurs occupations pour s’éloigner de l’assistanat».
M. Kabeya a, en outre, convié les femmes à adopter des comportements responsables et, surtout à se mettre ensemble, notamment dans des structures, pour faire valoir leurs droits, tout en les encourageant à engager des procédures judiciaires.
«Il faut forcer la porte des juges, ne pas se résigner. Le juge doit dire le droit. Une veuve est avant tout une femme et le rôle de la femme dans la société est bien connu. Les exemples sont légion prouvant que, de façon générale, leur vulnérabilité naturelle est prise en compte», a-t-il martelé.
La promotion des droits des veuves et orphelins, une urgence dans la société
M. Kabeya a indiqué que la promotion des droits des veuves et des orphelins constitue une urgence dans la société congolaise qui entre progressivement dans l’ère de la modernité. Cette promotion est conforme à la volonté de Dieu telle qu’elle est citée dans les « Saintes écritures ».
«La veuve et l’orphelin ne peuvent donc être un obstacle pour le développement de la société. Bien au contraire, le développement exige qu’on les prenne en considération, qu’on respecte leur dignité et leurs droits. Eux aussi participent à divers degrés liés au développement de la société», a-t-il souligné.
« J’invite les femmes les veuves à prendre connaissance des textes juridiques portant protection de la femme en général et de la femme veuve, notamment le code de la famille. Toute veuve est appelée à s’opposer aux pratiques qui vont à l’encontre de l’évolution de la société actuelle », a insisté M. Kabeya
De nombreuses femmes dans le monde, à la perte de leur partenaire sont souvent confrontées à plusieurs problèmes, notamment l’exclusion sociale et l’extrême pauvreté. Le combat pour leurs droits fondamentaux et leur dignité sont également amplifiés, a-t-il conclu.
Cette conférence-débat avait pour thème : « Les coutumes et lois traditionnelles ne doivent pas asservir la personne humaine : le veuvage, les rites et la succession ».
Ce débat visait avant tout sensibiliser et informer les veuves en situant la thématique dans leur vécu et dans sa dimension juridique, sociologique et économique.
Apporter des pistes de solutions à la situation difficile que traversent les femmes veuves est l’objectif visé par cette rencontre.
ACP/ODM