Trois questions à Georges Wawa, professeur de journalisme

Kinshasa, 6 juin 2023 (ACP).- Les défis des médias traditionnels face à la presse en ligne en République démocratique du Congo ont été évoqués, lundi, par le professeur Georges Jérémie Wawa, écrivain et spécialiste en écriture journalistique, lors d’un entretien avec l’ACP.

Ce docteur en sciences de l’information et de la communication a profité de l’occasion pour appeler le gouvernement, qui est le garant du droit à l’information des citoyens, à venir en aide aux médias traditionnels pour éviter leur disparition.

Question 1 : Avec l’évolution des nouvelles technologies de l’information et de la communication, notamment la multitude des réseaux sociaux et des médias en ligne, ceux-ci ont pris de l’ampleur en défaveur de la presse traditionnelle. Quelle lecture faites-vous de cette problématique en RDC ?

Professeur Wawa : « À notre époque, il y avait des journaux scolaires. À Kinshasa, il y avait la presse des jeunes, la presse de dimanche. Les gens lisaient. Mais aujourd’hui, nous avons perdu ce goût-là. Ce n’est pas un phénomène congolais, il est universel. Un peu partout dans le monde, les gens n’ont plus assez de temps à consacrer à la lecture et pour cause, tout est à notre portée à travers le téléphone. Pour moi, c’est un phénomène communicationnel qu’il faut appréhender »

Question 2 : Quels sont les défis que les médias congolais doivent relever face aux médias en ligne, pour ne pas disparaître ?

Professeur Wawa : « Pour ne pas disparaître, les médias traditionnels n’ont pas d’autres choix que de s’adapter. Presque tous ont compris la leçon. Pour preuve, la presse écrite paraît en deux versions, une version en papier et une autre en ligne.

Les radios d’informations et les télévisions d’informations diffusent en ligne également. C’est pourquoi je réaffirme que tous les médias sont complémentaires et que les journalistes, aujourd’hui, doivent apprendre à travailler en ligne. Ils n’ont pas d’autres choix parce que c’est une poussée technologique effrénée et Dieu seul sait à quel moment ça va s’arrêter.

Mais les futurologues disent déjà qu’il y aura un après internet. Alors de quoi va-t-il ressembler ? Attendons voir ».

Question 3 : En tant que spécialiste du secteur des médias, de quelles stratégies doivent se doter les responsables des médias traditionnels pour se maintenir ?

Professeur Wawa : « La première stratégie, c’est de s’adapter, ne pas ignorer l’internet et poursuivre le lecteur, l’auditeur, le téléspectateur présent sur les réseaux sociaux et les médias sociaux, c’est-a-dire être présent en ligne.

La deuxième stratégie, c’est du côté des pouvoirs publics. C’est le moment pour le gouvernement qui est le garant du droit à l’information des citoyens, tel que prescrit par la Constitution, de venir en aide aux médias traditionnels pour éviter qu’ils ne disparaissent, surtout que la concurrence est criante.

Si nous nous référons aux articles 17 et 18 de la loi n°96-002 du 22 juin 1996, fixant les modalités de la liberté de la presse, il est prévu l’aide indirecte de l’État à la presse. 

Qu’il plaise au gouvernement ou mieux à l’autorité budgétaire qui est l’Assemblée nationale de demander au gouvernement de rendre effective l’aide indirecte à la presse telle que stipulée aux articles susmentionnés.

Pour mieux garantir le droit à l’information des citoyens et aller au delà de la loi de 1996, pourquoi ne pas accorder l’aide directe à la presse?

Si l’État ne peut pas prendre en charge le salaire des journalistes, il peut prendre le budget de fonctionnement de la presse. Cela va nous encourager aussi, nous qui formons les journalistes à créer des débouchés. A quoi bon produire des journalistes si les médias fermaient ?

Si aujourd’hui les journalistes vivent dans la précarité, comment le citoyen sera-t-il informé ? Comment le journaliste pourra-t-il vivre? Allons-nous condamner cette catégorie des citoyens à la mendicité ? Aujourd’hui les gens parlent en mal des journalistes, mais voyez les conditions de travail des journalistes congolais qui, pour la plupart, travaillent sans contrat qui les lient à leurs employeurs.

Et pourtant, c’est prévu dans les textes législatifs, notamment l’ordonnance loi n° 81-012 du 02 avril 1981 portant statuts des journalistes œuvrant en RDC. Cette loi n’a jamais été abrogée, ni modifiée, elle est toujours en vigueur. C’est cette loi qui impose la signature des contrats de travail entre le journaliste et l’employeur. Elle évoque même des conventions collectives entre l’employeur et le personnel, alors pourquoi dans notre pays, nous avons l’absence de la culture d’application des textes ? Je pense que les gouvernants et les gouvernés trouveront leur compte ».

ACP/

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